Au Chili, les députés ont approuvé ce mardi une procédure de destitution lancée contre le président Sebastian Pinera, pour la vente controversée d’une compagnie minière, réalisée dans un paradis fiscal et révélée par l’enquête internationale des Pandora Papers.
« Ce président a été accusé de deux choses graves, la violation des droits de l’homme et la compromission de l’honneur de la nation, j’espère que cette chambre approuvera la #AcusaciónConstitucional, sinon le pays jugera ceux qui voteront contre », a tweeté le député de l’opposition Jaime Naranjo, qui a réalisé une prouesse politique et historique en menant l’intervention la plus longue de l’histoire du parlement chilien : 14 heures d’exposé, 1300 pages lues, et deux courtes pauses. « Je parlerai tout le temps nécessaire pour que Giorgio Jackson rejoigne la chambre des députés », avait-il averti sur son compte Twitter. L’objectif : assurer les 78 votes nécessaires à l’approbation par la chambre des députés, de l’accusation constitutionnelle contre le président Pinera. Le plan de l’opposition était donc de prolonger la session afin que le député Giorgio Jackson puisse achever sa quarantaine après avoir été cas-contact, et aille voter.
Victoire. Après 14 heures d’un marathon historique, la poursuite de la procédure de destitution a été approuvée, à 78 voix contre 67, et 3 abstentions.
C’est en octobre dernier qu’un député d’opposition, Tomas Hirsch, avait engagé la procédure de destitution, après les révélations des Pandora Papers sur des opérations douteuses réalisées par des personnalités politiques ou du monde des affaires. Le président Piñera a utilisé « sa fonction pour réaliser des affaires personnelles », avait alors déclaré le député en présentant cette requête devant la Chambre basse.
En effet l’affaire du vaste projet minier est controversé car le site est situé à seulement 30 kilomètres de la réserve nationale du manchot de Humboldt, où vit 80 % de la population mondiale de cette espèce protégée. Or en 2010, le président et homme d’affaires chilien a vendu à son ami Carlos Délano sa part dans le projet, une partie du paiement étant conditionnée à ce que la zone ne soit pas déclarée réserve naturelle. Ce que le gouvernement de Piñera n’a pas fait.
Si cette vente était déjà connue, l’acte de la transaction est apparu dans les Pandora Papers. À la lumière de ce nouvel élément, le parquet chilien avait ouvert une enquête contre le président, qui fait aujourd’hui face à un procès en destitution. Même s’il appartient désormais au Sénat de se prononcer, et que les voix à réunir seront difficiles à obtenir, les députés ont montré que les violations des droits de l’homme sous le gouvernement de Piñera peuvent ne pas rester impunies.