Lakhdar Bouregaâ est décédé à cause du coronavirus le mercredi 4 novembre 2020. Il avait 87 ans. Il rejoint le FLN puis combat au sein de l’Armée de Libération Nationale en 1956. Il fait partie des fondateurs du Front des forces socialistes en 1963. Il s’agit du plus vieux parti d’opposition en Algérie.
Figure de l’indépendance algérienne, il prend part au hirak dès 2019. Il s’agit des manifestations contre la candidature d’Abdelaziz Bouteflika à un cinquième mandat présidentiel et un changement en profondeur du régime. Pour cela, il est emprisonné le 30 juin 2019 puis libéré le 2 janvier 2020. Son emprisonnement avait suscité l’indignation sur les réseaux sociaux.
Sa mémoire est à présent saluée de manière très large sur les réseaux sociaux.
Sur Facebook, Said Sadi lui a rendu hommage :
Bouregaa : un homme du peuple
Ainsi donc, ce que n’ont pas pu faire les opérations de la quatrième armée du monde et les abus d’un système autocratique vient d’être commis par un misérable virus. Lakhdar Bouregâa part après avoir vécu en homme libre. Peu instruit, il était cependant curieux de tout. Je l’ai souvent reçu à mon bureau où il venait échanger. Je le revois encore commentant l’actualité avec passion. Ses avis, quelques fois expéditifs, étaient néanmoins toujours sincères. En politique, Bouregâa ne calculait jamais. Il fonctionnait à l’affect. Ce que certains de ses compagnons voyaient comme de l’instabilité était en réalité de la spontanéité. L’ancien baroudeur qui n’avait pas d’ambition avait cependant une morale : ne jamais aller à contre courant de ses intuitions, quitte à devoir évoluer par la suite. Ce trait de caractère, que je connaissais moi aussi, ne m’avait pas empêché de lui dédier – avec Samira Messouci – mon livre consacré à la révolution de février 2019.
Sa vie est un condensé de l’Histoire récente de notre pays. Paysan écrasé par le joug colonial, il sut faire du combat contre l’injustice une école de la liberté. À l’indépendance, il se rangea naturellement du côté des mouvements se dressant contre l’arbitraire. Avec l’avènement du multipartisme, il fréquenta les acteurs qui préconisaient l’alternative démocratique. A la fin de sa vie, il dut affronter à titre personnel ce que le peuple subissait en tant qu’entité collective : l’humiliation. Pour se venger de son implication dans l’insurrection citoyenne, le pouvoir alla jusqu’à le faire passer pour un escroc qui aurait usurpé son statut d’officier de la guerre de libération !Le parcours de Lakhdar Bouregâa est un reflet de notre histoire tragique : avec sa ferveur, ses fragilités et sa sincérité. Il va nous manquer. Repose en paix Âami Lakhdar. Tu as fait ce que doit faire tout citoyen fidèle à lui-même et son peuple : se battre jusqu’au dernier souffle. Nous ne t’oublierons pas.
Page Facebook de Said Sadi