Dimanche 27 juin, Saïd Sadi s’est exprimé sur sa page Facebook, sur la situation politique en Algérie. L’ancien président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) évoque une « chasse à l’homme » et dénonce les arrestations de militants politiques de la région kabyle.
« Il ne se passe plus une journée sans qu’une arrestation, une interpellation ou une convocation ne vienne cibler un individu ou une organisation en Kabylie. Souvent en violation des lois en vigueur. Pourtant, aucun des acteurs visés n’a revendiqué ou commis le moindre acte de violence », a écrit Saïd Sadi en introduction d’un texte publié sur sa page Facebook dimanche 27 juin.
Actuellement en Algérie, 300 détenus d’opinion sont en prison pour avoir exprimé une opinion hostile au gouvernement, pour avoir manifesté ou écrit un post critique sur les réseaux sociaux. Le président Abdelmadjid Tebboune disait vouloir solder les années Bouteflika… et la répression des opposants a atteint des niveaux jamais observés sous la présidence précédente.
« La Kabylie est offerte en victime expiatoire »
Saïd Sadi poursuit : « C’est bien connu en Algérie, les périodes d’alternance clanique sont toujours marquées par une guerre sans merci. Et une fois de plus, la Kabylie est offerte en victime expiatoire, le temps que les parrains trouvent accord sur la façon de recomposer le système. Les manipulations à l’origine de certaines initiatives ou propos ne doivent pas faire perdre de vue une pratique politique qui remonte à la funeste année 1957 lorsque l’opacité et la violence firent basculer le destin algérien dans le règne de l’imposture où la Kabylie fut régulièrement désignée comme la menace originelle qui pèserait sur la nation. »
L’homme politique laïc et progressiste appelle à la vigilance et affiche son soutien aux détenus politiques : « Le scénario n’a pas manqué d’être exhumé à chaque fois que le régime devait affronter une crise politique majeure. Et celle qu’il traverse aujourd’hui ne manque ni d’intensité ni de complexité. En la circonstance, notre devoir est de faire preuve d’autant de détermination que de vigilance. Cette attitude est à la fois une réponse politique adressée au pouvoir et une stimulation des anticorps de notre société. Pour l’heure donc, la solidarité sans faille doit être affirmée envers tous les internés et toutes les victimes du harcèlement policier et judiciaire. Cette solidarité doit être rapidement déclinée sous forme d’assistance morale et matérielle due aux familles. »
Les militants en Algérie sont actuellement confrontés à une dérive dangereuse où les droits démocratiques les plus fondamentaux sont violés et les activités ou opinions politiques criminalisées.
Les marches du Hirak – mouvement de contestation populaire anti-régime commencé en 2019 et qui avait abouti à la mise à l’écart de Bouteflika, subissent une répression autoritaire et un acharnement policier et judiciaire de plus en plus violent. Journalistes, juristes, professeurs, activistes politiques et défenseurs des droits sont actuellement enfermés et victimes de lawfare pour certains, pour avoir manifesté contre le régime et exigé un vrai changement dans le pays.
Les marches du Hirak sont particulièrement concentrées dans la région kabyle, frondeuse et mobilisée contre le vote, du référendum en novembre, et des législatives le 12 juin dernier.
Saïd Sadi alerte sur une forme d’Apartheid : « Aussi, il devient impératif de sensibiliser l’opinion nationale et internationale sur les risques que fait peser sur le pays ce qui s’apparente à une forme d’apartheid où la loi s’applique de façon sélective selon le statut social, l’origine régionale ou la proximité avec le pouvoir du justiciable. Rappelons, entre autres cas, que dans un passé pas si lointain, on a vu un chef d’Etat qualifier de traître l’architecte de la Révolution et entendu, plus récemment, une députée proférer des ignominies envers des personnages historiques ou des populations amazighes sans que la justice n’ait estimé devoir intervenir ni les intellectuels organiques s’indigner. »
« Les turbulences actuelles ne sont ni anecdotiques ni conjoncturelles ; elles sont les symptômes d’une longue et vieille maladie algérienne. »
L’auteur engagé dans le combat démocratique algérien ajoute que « le sort réservé à la Kabylie et la réaction qu’elle oppose aux attaques dont elle est l’obsession récurrente ont toujours été un bon indicateur de la situation générale du pays. Et le moins que l’on puisse dire, est que celle d’aujourd’hui n’est pas rassurante ».
Il termine son texte par un mot à ses amis : « C’est dans les moments de tempête que l’on reconnait les bons marins. L’efficacité est le contraire de l’improvisation. L’impulsivité est souvent l’ennemie de la raison. Les anciennes recettes sont périmées et une réflexion devant réinitialiser notre logiciel est urgente. Le défi de la libération citoyenne est un combat au long cours. »