Cet article fait partie du dossier Contre le lawfare

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Prisonniers palestiniens : le silence tue

Par milliers, les Palestiniens, résistants ou simples civils, croupissent dans les prisons israéliennes, en toute illégalité au regard du droit international. L’emprisonnement de masse est une stratégie mise en œuvre depuis 1967 pour tenter de briser la résistance d’un peuple. Dans cette tribune pour Le Monde en Commun, la députée Ersilia Soudais membre de la Commission des affaires étrangères, dresse un état des lieux et exhorte le gouvernement français à agir pour la libération de Salah Hamouri, avocat franco-palestinien qui se bat pour la défense des droits humains et la société civile palestinienne. Emprisonné depuis le 7 mars 2022, sa détention a été prolongée de trois mois en septembre dernier. Une décision politique qui témoigne de l'acharnement absolu des autorités israéliennes contre Salah Hamouri et du manque d’action évident de la diplomatie française.

Détention administrative : la loi de l’arbitraire

Lorsque la loi du plus fort s’applique au détriment de l’État de droit, ce sont des hommes, des femmes et des enfants dont la vie est subitement bouleversée. Selon les dernières estimations de l’organisation Addameer, l’État d’Israël détient 4 700 prisonniers politiques, dont près de 800 par mesure administrative, dans une proportion qui a doublé en 10 ans. Des êtres humains sont ainsi privés de liberté sans inculpation, sans procès, sans preuve, parfois après des dénonciations anonymes sans fondement, et se retrouvent derrière les barreaux de prisons en territoire occupé.
Pourquoi ce qui ne serait admis d’aucun pays dit démocratique peut être pratiqué impunément par les autorités militaires israéliennes, sans que la communauté internationale ne s’en offusque et encore moins le condamne ? À qui revient la responsabilité de garantir les droits humains lorsque même les représentants du peuple sont mis au ban de la démocratie comme ce fut le cas à maintes reprises pour Khalida Jarrar ? Membre du Conseil Législatif Palestinien pour le FPLP, cette femme de 59 ans a été placée en détention administrative durant plus de 57 mois au total. Les autorités militaires israéliennes lui ont même refusé le droit de se rendre aux obsèques de sa fille en juillet 2021.

Ces autorités bâillonnent et condamnent au silence celles et ceux qui ont osé parler à haute voix, osé dénoncer les bourreaux, osé interpeller la conscience internationale, car gare à celles et ceux qui voudront tel David affronter Goliath. Ils vivront désormais avec la menace d’un nouvel emprisonnement comme une épée de Damoclès pesant continuellement au-dessus de leurs têtes.
« Terroristes ! » clame le système administratif et militaire israélien.
« Antisémites ! » vilipendent, ailleurs dans le monde et sans s’embarrasser des amalgames, ceux qui soutiennent mordicus la politique de cet État.

Israël et les Droits de l’Enfant

Existe-t-il une seule raison qui pourrait justifier l’enfermement d’enfants comme Ahmad Manasra qui, depuis ses 13 ans, est privé de liberté et a développé des troubles psychiques à la suite de nombreux placements en isolement et de mauvais traitements ?
Selon Defence for Children International – Palestine, qui s’appuie sur les données publiées par le service pénitentiaire israélien, 20 enfants étaient placés en isolement carcéral en janvier 2022. 168 étaient « détenus pour la sécurité ». L’ONG dénombre également plus de 2000 morts d’enfants par armes à feu ces 20 dernières années.
L’État d’Israël est pourtant tenu de respecter les dispositions de la Convention Relative aux Droits de l’Enfant (CIDE) prise lors de l’Assemblée générale des Nations Unies du 20 novembre 1989 et qu’il a ratifiée. Il y est précisé que la détention ou l’emprisonnement d’un enfant doit « n’être qu’une mesure de dernier ressort, et être d’une durée aussi brève que possible ».
Amnesty International a dénoncé la prolongation de l’isolement d’Ahmad Manasra dont l’état de santé mental s’est gravement détérioré. Sa situation illustre aussi bien le non-respect des droits de l’enfant que la question de la négligence médicale.

De nombreux prisonniers sont en effet uniquement soignés à « coup de doliprane », bien qu’ils présentent parfois de lourdes pathologies chroniques qui nécessitent des prises en charge spécifiques, réduisant ainsi considérablement leur espérance de vie.

Salah Hamouri face à l’impuissance de la France

C’est contre ce déni des droits humains que se bat Salah Hamouri, avocat franco-palestinien, détenu depuis le 7 mars 2022 dans des conditions indignes et placé à l’isolement dans une cellule de 4m², sans fenêtre, en représailles à une grève de la faim entamée aux côtés de 29 autres prisonniers politiques. Salah Hamouri était alors privé de sel, substance vitale dans le cadre d’une grève de la faim. Délesté de 14 kilos et grandement affaibli, Salah Hamouri a finalement mis fin à cette grève au bout de 19 jours, en échange de la libération prochaine de prisonniers âgés, malades, ainsi que de femmes et d’enfants en détention administrative.

Le gouvernement français et la représentation diplomatique se contentent d’un rôle passif, de visites consulaires en visites consulaires, sans obtenir la moindre avancée dans ce dossier, sans pouvoir obtenir la moindre visite familiale, le moindre coup de fil, et sans pouvoir mettre fin à un harcèlement qui dure depuis une vingtaine d’années. Dans ces conditions, difficile d’envisager une libération de Salah Hamouri rapide. Il est pourtant du devoir de la France de porter assistance à tous ses ressortissants partout dans le monde, et en particulier lorsque les droits humains élémentaires de ceux-ci sont bafoués.

Combien de temps faudra-t-il attendre pour que la France hausse le ton face à des mesures punitives que des experts de l’ONU ont eux-mêmes qualifiées de « sadiques » ? Quand la France se décidera-t-elle à convoquer l’ambassadeur israélien ? Combien de détenus administratifs faudra-t-il encore avant que la communauté internationale condamne fermement le « système d’apartheid imposé par l’État d’Israël au peuple palestinien », selon les mots d’Amnesty International ?

Si l’inaction est dangereuse, méfions-nous du silence. Il tue à petit feu celles et ceux que l’État d’Israël voudrait voir plonger dans l’oubli, donnant ainsi raison à Doris Lessing qui disait : « Très peu de monde se soucie réellement de la liberté, de la vérité. Rares sont ceux qui ont de l’envergure, cette force dont dépend la vraie démocratie. En l’absence de gens courageux, une société libre meurt, ou ne naît pas. »

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Marina Mesure

Syndicalisme international

Marina Mesure is a specialist of social issues. She has worked for several years with organizations defending workers’ rights such as the European Federation of Building and Wood Workers.

She has campaigned against child labor with the International Labor Organization, against social dumping and the criminalization of unionism. As a famous figure in the international trade union world, she considers that the principle of “equal work, equal pay « remain revolutionary: between women and men, between posted and domestic workers, between foreigners and nationals ».

Marina Mesure, especialista en asuntos sociales, ha trabajado durante varios años con organizaciones de derechos de los trabajadores como la Federación Europea de Trabajadores de la Construcción y la Madera.

Llevo varias campañas contra el trabajo infantil con la Organización Internacional del Trabajo, contra el dumping social, y la criminalización del sindicalismo. Es una figura reconocida en el mundo sindical internacional. Considera que el principio de « igual trabajo, igual salario » sigue siendo revolucionario: entre mujeres y hombres, entre trabajadores desplazados y domésticos, entre extranjeros y nacionales « .

Spécialiste des questions sociales, Marina Mesure travaille depuis plusieurs années auprès d’organisations de défense des droits des travailleurs comme la Fédération Européenne des travailleurs du Bâtiment et du Bois.

Elle a mené des campagnes contre le travail des enfants avec l’Organisation internationale du travail, contre le dumping social, la criminalisation du syndicalisme. Figure reconnue dans le monde syndical international, elle considère que le principe de « travail égal, salaire égal » est toujours aussi révolutionnaire : entre les femmes et les hommes, entre les travailleurs détachés et domestiques, entre étrangers et nationaux ».

Sophia Chikirou

Directrice de la publication

Sophia Chikirou is the publisher of Le Monde en commun. Columnist, director of a documentary on the lawfare, she also founded several media such as Le Média TV and the web radio Les Jours Heureux.

Communications advisor and political activist, she has worked and campaigned in several countries. From Ecuador to Spain, via the United States, Mexico, Colombia, but also Mauritania, she has intervened with progressive and humanist movements during presidential or legislative campaigns.

In 2007, she published Ma France laïque (La Martinière Editions).

Sophia Chikirou es directora de la publicación de Le Monde en commun. Columnista, directora de un documental sobre el lawfare, también fundó varios medios de comunicación tal como Le Média TV y la radio web Les Jours Heureux.

Asesora de comunicacion y activista política, ha trabajado y realizado campañas en varios países. Desde Ecuador hasta España, pasando por Estados Unidos, México, Colombia, pero también Mauritania, intervino con movimientos progresistas y humanistas durante campañas presidenciales o legislativas.

En 2007, publicó Ma France laïque por Edicion La Martinière.

Sophia Chikirou est directrice de la publication du Monde en commun. Editorialiste, réalisatrice d’un documentaire sur le lawfare, elle a aussi fondé plusieurs médias comme Le Média TV et la web radio Les Jours Heureux.

Conseillère en communication et militante politique, elle a exercé et milité dans plusieurs pays. De l’Equateur à l’Espagne, en passant par les Etats-Unis, le Mexique, la Colombie, mais aussi la Mauritanie, elle est intervenue auprès de mouvements progressistes et humanistes lors de campagnes présidentielles ou législatives.

En 2007, elle publiait Ma France laïque aux éditions La Martinière.

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