Et depuis le début nous disons qu’il ne peut être question de partir sans que ce plan soit connu. Le départ dépend de cela. Hier, soudain le gouvernement français a annoncé la suspension de la coopération militaire bilatérale de la France avec le Mali. Et cela « à titre conservatoire et temporaire ». Cette décision entraîne l’arrêt automatique des opérations de la force Barkhane avec l’armée malienne.
Elle est étrange, irresponsable face à l’ennemi, et inapplicable en réalité. Une fois de plus la macronie est prise de court, incapable de prévoir un évènement pourtant préparé de longue main semble-t-il. Aucune alerte ne semble avoir été déclenchée après que Macron ait lui-même personnellement adoubé au Tchad (et en se rendant sur place pour le faire), un autre putschiste, un général fils du maréchal-président tué, Idriss Deby. Personne ne semble avoir prévenu le président français qu’il avait ainsi envoyé un signal singulièrement encourageant pour tous les aventuriers de la région. Personne ne semble s’être soucié de savoir ce qui était en train de se préparer.
Au Mali, ce nouveau putch est la suite logique de la séquence ouverte le 18 août 2020, par un coup d’Etat déjà. Ibrahim Boubacar Keïta, dit IBK, au pouvoir depuis 2013 avait été mis en place par le gouvernement français. L’oligarchie corrompue qui entourait IBK détournait aussi les moyens de la lutte contre les groupes armées qui semait le chaos dans toute la moitié nord du pays. Grâce à des semaines de mobilisation de tout le peuple malien, le M5-RFP était venu à bout de la légitimité d’IBK.
Les putschistes militaires avaient alors détourné à leur profit l’immense insurrection citoyenne portée par une coalition des forces politiques et de la société civile, le M5-RFP. Pris de vitesse, dépassé, le gouvernement français avait alors négocié avec les militaires la nomination des deux dirigeants civils. Ils viennent d’être à nouveau renversés. Le peuple malien n’est pas une masse amorphe qui passe d’une main à l’autre sans réaction. Car la question du manque de « légitimité démocratique » des autorités maliennes n’est pas nouvelle. Elle a été posée en premier lieu par le seul acteur légitime de cette histoire : le peuple malien lui-même. Ce dernier ne semble pas rentrer dans les équations du gouvernement français. Le constat de la décomposition d’un Etat malien dont l’incapacité à remplir ses fonctions de base est une des causes majeures de l’insécurité dans le pays, est encore plus ancien.