Le marché du travail espagnol est en pleine ébullition. Pour la première fois depuis 2008 et le début de la crise financière, le nombre de personnes sans activité est passé sous le seuil des 3 millions de personnes. En un mois, ce sont près de 100 000 personnes qui ont su trouver un nouvel emploi. La droite dénonce un trompe-l’œil, les embauches étant plus fréquentes au mois de mai, particulièrement dans le secteur agricole. Pourtant les faits sont là, indéniables : près de la moitié des nouveaux contrats signés sont des contrats à durée indéterminée. Une réalité visible depuis le mois d’avril avec une explosion impressionnante du nombre de CDI. Les chiffres sont éloquents. Ces CDI représentaient près de 10 % des signatures de contrats auparavant avec 90 % de contrats à durée indéterminée, temporaires. Désormais, l’on signe presque autant de CDI que de contrats plus précaires.
Le coupable de cette révolution ? Une réforme du travail ambitieuse adoptée en décembre par les parlementaires espagnols de la majorité. Une réforme entrée en application il y a trois mois et qui vise à lutter contre la précarisation de certains salariés qui accumulent depuis des années des contrats courts. Certains employeurs pouvaient par exemple embaucher une personne de façon répétée les lundis avant que le contrat ne prenne fin les vendredis. Et ainsi de suite la semaine suivante pendant des mois. Des pratiques inhumaines désormais révolues. Si le nombre de CDI devrait mécaniquement se tasser au fur et à mesure des signatures, le gouvernement reste confiant dans la possibilité que cette poussée des contrats à durée indéterminée demeure à un seuil élevé. Désormais, ce sont 20 millions de personnes qui bénéficient d’un CDI, du jamais-vu.
Ce dynamisme est un bon indicateur pour le gouvernement qui espère une reprise de l’activité économique dans un pays durement touché par le Covid. Par ailleurs, en plus d’une législation plus resserrée contre les contrats précaires, il a accompagné ces nouveaux salariés par une forte progression du SMI, le salaire minimal espagnol. Celui-ci a obtenu un grand coup de pouce de 35 %, atteignant 1 000 euros, pour soutenir les plus précaires à affronter la hausse du coup de la vie. À terme, l’Espagne va tirer ce SMI vers 1 050 euros, ce qui correspond à 60 % du salaire moyen en Espagne. Un seuil de 60 % présent dans la Charte sociale européenne afin de lutter contre les inégalités. Le pays ibérique est actuellement 2ème en Europe dans le respect de cet mesure, derrière la Slovénie.
Une hausse qui n’a donc pas eu d’incidence sur le nombre de CDI et qui témoigne de l’importance d’un peu d’ambition et de volonté politique pour tirer le monde du travail vers le haut.