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Ce que vous n’aurez pas entendu lors de « l’interview » d’Emmanuel Macron sur les questions internationales

Mardi matin, Emmanuel Macron a été interviewé par Léa Salamé sur des questions d’ordre international. C’était à l’occasion d’une journée spéciale de France Inter et Konbini consacrée aux femmes afghanes #AvecLesAfghanes. Mais le Président a aussi parlé d’autres sujets, lors d’un exercice pur d’interview passe-plat pendant laquelle il a tranquillement pu dérouler ses « éléments de langage », sans qu’aucune question un tant soit peu dérangeante ne lui soit posée. L’actualité des dernières semaines soulève pourtant quelques interrogations sur sa politique étrangère…

Au sujet de l’Algérie, il eut été intéressant de demander à Emmanuel Macron s’il pense réellement que « la coopération mémorielle » entre les deux pays (puisque c’est son but affiché) passe par faire l’unanimité contre lui en Algérie. Mettre d’accord le Hirak et le régime algérien n’est, quoi qu’il en soit, pas un mince exploit.

Il a aussi parlé du Mali et de l’Afghanistan. Si on met de côté les formules convenues et sans lendemain sur le sort terrible des femmes afghanes (qui n’intéresse les journalistes vedettes que depuis que les talibans sont au pouvoir), il eut été intéressant de questionner la stratégie de la France au Mali. Rien à voir entre les deux situations nous dit le gouvernement depuis plusieurs semaines. Puisque dans un cas l’entrée en guerre s’est faite contre le régime taliban en 2001, dans l’autre cas à la demande du régime malien en 2013.

Certes, mais passée cette différence formelle, que de points communs ! L’entrée en guerre a été décidée dans les deux cas sur la base d’objectifs flous, donc sans plan de désengagement une fois ceux-ci supposés atteints. Les « guerres au terrorisme » sont des guerres sans fin. Après un accueil initialement positif de la part des peuples, les puissances interventionnistes sont dans les deux cas devenues au fil des années des puissances occupantes aux yeux de la majorité.  Dans les deux cas aucune solution politique n’a été trouvée, voire même cherchée. Enfin, au Mali comme en Afghanistan la France a été rendue largement dépendante de décisions étasuniennes.

A ce sujet, en pleine crise diplomatique, nous a-t-on dit, avec l’empire, les relations avec les États-Unis n’ont pas été évoquées… L’interview du Président était le moment idoine pour qu’il explique sa vision, ses intentions, son plan. Le président a forcément un plan…

Rien. Pas une question. Les possibilités ne manquaient pourtant pas. La Chine est-elle une menace telle qu’il serait dans l’intérêt de la France de se mettre à la remorque du pivot étasuniens dans la zone indopacifique ? Beaucoup de diplomates et de militaires eux-mêmes en doutent. Vue la manière dont les États-Unis ont traité la France dans l’affaire des contrats de sous-marins destinés à la marine australienne, sont-ils nos alliés ? Si oui quel sens donner à ce terme ? Le rappel de deux ambassadeurs est-il une mesure à la hauteur de l’humiliation subie et des enjeux ?  Quelles conclusions en tirer sur notre présence dans l’OTAN ? etc.

Il s’agit là de choix géopolitiques matriciels, structurants, qui engagent l’avenir de notre pays. Mais Léa Salamé et Emmanuel Macron n’en ont pas parlé. Peut-être le communiqué conjoint publié après l’entretien téléphonique du président avec Joe Biden, le 22 septembre, est-il considéré comme une réponse suffisante. Macron aurait depuis « exigé » auprès du Secrétaire d’État US Antony Blinken, de passage à Paris, des décisions et des actes d’ici sa rencontre avec Joe Biden lors du sommet du G20 fin octobre. Des actes devant concrétiser les grands principes résumés dans ce fameux communiqué faisant office de feuille de route, publié après la conversation entre Joe Biden et Emmanuel Macron.

Les États-Unis y redisent, sans rire « que l’engagement de la France et de l’Union européenne dans la région Indo-Pacifique revêt une importance stratégique, notamment dans le cadre de la stratégie de l’Union européenne pour la coopération dans la région Indo-Pacifique récemment publiée ». Ils reconnaissent « l’importance d’une défense européenne plus forte et plus capable, qui contribue positivement à la sécurité globale et transatlantique et est complémentaire à l’OTAN » (si elle avait abordé le sujet ne doutons pas du fait que Léa Salamé aurait noté que l’expression « autonomie stratégique » ne figure pas dans le communiqué. Est-ce à la demande des USA ou Macron a-t-il capitulé par anticipation ?). Ils s’engagent à « renforcer leur appui aux opérations antiterroristes conduites par les États européens dans la région du Sahel, dans le cadre de leur lutte commune contre le terrorisme ».

Bref, la ligne d’Emmanuel Macron est de demander aux USA : de bien vouloir faire une place à la France et à l’UE dans la stratégie d’endiguement de la Chine ; d’appuyer une défense européenne que personne ne conçoit autrement que comme une « complément de l’OTAN », et qui ne serait en aucun cas le socle  d’une « autonomie stratégique » (si tant est que cette notion puisse avoir un sens dans le cas de l’Union européenne) ; de renforcer leur soutien à une guerre au Sahel dont la France aurait au contraire tout intérêt à s’extirper.

Selon une source diplomatique, ces « exigences » feraient partie d’« une mise en garde adressée à ceux qui, aux États-Unis comme en Europe, suggèrent à Paris de tourner la page ». Joe Biden doit rire et se dire qu’il peut continuer à humilier la France, puisque son principal dirigeant en redemande.

Porteur d’une doctrine et d’une vision différente du rôle de la France dans le monde, et de l’évolution de celui-ci, Jean-Luc Mélenchon a proposé à Emmanuel Macron de débattre sur la politique étrangère de la France. Un débat qui mettrait ces questions cruciales au cœur de la campagne, à quelques mois du premier tour.

Mais cela non plus Léa Salamé n’en aura pas parlé au Président de la République. Vous avez dit radio de service public ?

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Marina Mesure

Syndicalisme international

Marina Mesure is a specialist of social issues. She has worked for several years with organizations defending workers’ rights such as the European Federation of Building and Wood Workers.

She has campaigned against child labor with the International Labor Organization, against social dumping and the criminalization of unionism. As a famous figure in the international trade union world, she considers that the principle of “equal work, equal pay « remain revolutionary: between women and men, between posted and domestic workers, between foreigners and nationals ».

Marina Mesure, especialista en asuntos sociales, ha trabajado durante varios años con organizaciones de derechos de los trabajadores como la Federación Europea de Trabajadores de la Construcción y la Madera.

Llevo varias campañas contra el trabajo infantil con la Organización Internacional del Trabajo, contra el dumping social, y la criminalización del sindicalismo. Es una figura reconocida en el mundo sindical internacional. Considera que el principio de « igual trabajo, igual salario » sigue siendo revolucionario: entre mujeres y hombres, entre trabajadores desplazados y domésticos, entre extranjeros y nacionales « .

Spécialiste des questions sociales, Marina Mesure travaille depuis plusieurs années auprès d’organisations de défense des droits des travailleurs comme la Fédération Européenne des travailleurs du Bâtiment et du Bois.

Elle a mené des campagnes contre le travail des enfants avec l’Organisation internationale du travail, contre le dumping social, la criminalisation du syndicalisme. Figure reconnue dans le monde syndical international, elle considère que le principe de « travail égal, salaire égal » est toujours aussi révolutionnaire : entre les femmes et les hommes, entre les travailleurs détachés et domestiques, entre étrangers et nationaux ».

Sophia Chikirou

Directrice de la publication

Sophia Chikirou is the publisher of Le Monde en commun. Columnist, director of a documentary on the lawfare, she also founded several media such as Le Média TV and the web radio Les Jours Heureux.

Communications advisor and political activist, she has worked and campaigned in several countries. From Ecuador to Spain, via the United States, Mexico, Colombia, but also Mauritania, she has intervened with progressive and humanist movements during presidential or legislative campaigns.

In 2007, she published Ma France laïque (La Martinière Editions).

Sophia Chikirou es directora de la publicación de Le Monde en commun. Columnista, directora de un documental sobre el lawfare, también fundó varios medios de comunicación tal como Le Média TV y la radio web Les Jours Heureux.

Asesora de comunicacion y activista política, ha trabajado y realizado campañas en varios países. Desde Ecuador hasta España, pasando por Estados Unidos, México, Colombia, pero también Mauritania, intervino con movimientos progresistas y humanistas durante campañas presidenciales o legislativas.

En 2007, publicó Ma France laïque por Edicion La Martinière.

Sophia Chikirou est directrice de la publication du Monde en commun. Editorialiste, réalisatrice d’un documentaire sur le lawfare, elle a aussi fondé plusieurs médias comme Le Média TV et la web radio Les Jours Heureux.

Conseillère en communication et militante politique, elle a exercé et milité dans plusieurs pays. De l’Equateur à l’Espagne, en passant par les Etats-Unis, le Mexique, la Colombie, mais aussi la Mauritanie, elle est intervenue auprès de mouvements progressistes et humanistes lors de campagnes présidentielles ou législatives.

En 2007, elle publiait Ma France laïque aux éditions La Martinière.

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