L’ampleur de l’échec surprend. Par 30 voix contre 23, Muriel Pénicaud ne dirigera pas l’Organisation internationale du travail (OIT). La candidate était pourtant portée par les pays européens, et tout particulièrement par la France d’Emmanuel Macron. Le président français avait été derrière la candidature de celle qui est aujourd’hui ambassadrice et représentante permanente de la France auprès de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). L’ancienne ministre du travail avait donc mené une campagne afin de devenir la nouvelle directrice générale de l’organisation. Une tentative soldée par l’échec, le soutien européen n’ayant pas suffi.
C’est la conséquence d’une gouvernance propre à l’OIT. 56 membres permanents se trouvent au Conseil d’administration. La moitié de ceux-ci représentent des gouvernements, 14 les employeurs et 14 autres les travailleurs. Cette gouvernance tripartite donne de l’importance aux trois composantes. Rapidement la situation était mal embarquée pour Muriel Pénicaud qui n’a pas bénéficié du soutien des représentants des travailleurs. Début mars, la Confédération Syndicale Internationale a écarté tout soutien à l’ancienne ministre, lui préférant le Togolais Gilbert Houngbo. La Française a pâti de son passé de ministre et les accusations d’avoir desservi les intérêts de ces travailleurs. Elle avait ainsi eu un rôle primordial dans l’adoption d’une politique de casse sociale dès le début du quinquennat d’Emmanuel Macron.
Le vote pour désigner le successeur de Guy Rider, directeur général de l’OIT en fin de mandat, a ainsi eu lieu le vendredi 25 mars à Genève. Alors que la plupart des sessions se déroulent sur 4 à 5 votes qui s’enchaînent avec une élimination successive de candidats, la partie ne s’est cette fois-ci jouée qu’en deux tours. Une claque pour Muriel Pénicaud qui est ainsi battue par Gilbert Houngbo. Celui-ci deviendra au passage le premier candidat issu du continent africain à diriger l’OIT lors de sa prise de fonction en octobre. Le Togolais est actuellement Président du Fonds international de développement agricole (FIDA) et était auparavant directeur général adjoint de l’OIT.
L’Organisation internationale du travail est une instance multilatérale rattachée à l’ONU et chargée de l’élaboration de normes internationales et de la conception et promotion de politiques publiques censées protéger les travailleurs. C’est dans cette logique que Gilbert Houngbo avait fait campagne avec l’idée d’impliquer l’ensemble des parties prenantes dans ses prises de décision, en devenant le « directeur général de tout le monde ». À l’issue de son élection il a d’ailleurs tenu à rendre hommage aux victimes de discriminations, d’inégalités dans le marché du travail, notamment dans le secteur informel.