A partir de ce moment, des manifestations ont éclaté un peu partout dans le pays et n’ont fait qu’augmenter de manière exponentielle. Cette lutte se forme contre un gouvernement jugé comme usurpateur. Les médias, les ministres, les députés, les militaires, les procureurs et les juges mercenaires travaillent conjointement pour donner l’image d’une démocratie. Mais l’État de droit n’existe plus au Pérou et on compte déjà plus de soixante victimes assassinées par la répression, principalement dans les régions andines. Pourquoi l’Union Européenne ne condamne pas d’une seule voix ce gouvernement fasciste ? Que fait le Département d’état des Etats-Unis pour arrêter ce massacre ?
La genèse de cette crise et la première présidente au Pérou
Le rôle du « Fujimorisme » n’a pas été suffisamment pris en compte dans cette crise. Tout le monde se concentre sur le 7 décembre, avec son bilan violent et inquiétant de mauvaise gestion, de manifestations sociales massives, de violences et de morts inexpliquées. En réalité, le problème a commencé en 2016 lorsque Keiko Fujimori perd les élections pour la deuxième fois contre Pedro Pablo Kuczynski. Elle ne va pas reconnaître sa défaite et décide alors de gouverner depuis le Congrès où elle obtient une large majorité. Plus tard Kuczynski démissionne à cause des accusations de corruption qui sont mises à jour, mais surtout parce qu’il savait que le congrès allait le démettre. Son vice-président Martin Vizcarra arrive alors et le même choc frontal entre l’exécutif et le Congrès se produit, jusqu’à sa révocation et remplacement par Manuel Merino, président du congrès et puis une semaine après – des manifestations violentes et deux morts – par Francisco Sagasti.
Avec les élections de 2021, un autre niveau est atteint : Keiko Fujimori se présente pour la troisième fois. Au second tour, elle affronte Pedro Castillo, un parfait inconnu, un enseignant originaire de Chota dans les Andes. Elle et ses conseillers étaient confiants dans la victoire mais elle a encore une fois perdu. Par la suite, le même film se répète, mais cette fois-ci elle décide non seulement de ne pas concéder la défaite, mais de contester la victoire de son adversaire avec des fausses accusations de fraude. Jusqu’à sa chute, le parti Fuerza Popular de Fujimori et autres forces d’opposition n’ont jamais arrêté les hostilités envers le gouvernement de Castillo.
Six ans et cinq présidents plus tard, la sixième présidente du Pérou officialise, le 10 décembre, la nomination des 18 membres de son cabinet, en prêtant un serment, qui n’est pas passé inaperçu, celui de faire jurer à ses ministres de ne pas « commettre d’actes de corruption ». Son chef de cabinet, Pedro Miguel Angulo, ancien procureur général, promet lui aussi de « combattre la corruption ». Un pur discours démagogique.
Dix jours plus tard, il y avait déjà vingt-huit morts dans les grandes manifestations du sud du pays, deux démissions ministérielles et l’état d’urgence était déclaré dans plusieurs régions du pays. Avec un tel passif, le premier cabinet tombe le 21 décembre, pour être remplacé par celui d’Alberto Otárola, jusqu’alors ministre de la Défense et directement impliqué dans les ordres meurtriers de tirer contre les manifestants. L’année 2023 s’annonçait comme celle de toutes les luttes et depuis la crise n’a fait que s’aggraver dans tout le Pérou, en particulier dans la région amazonienne et dans le centre et le sud du pays.
Le 10 janvier, au milieu d’intenses manifestations qui ont pratiquement paralysé une partie entière
du Pérou, le Congrès accorde la confiance au second cabinet, après un débat tendu au cours duquel l’opposition a clairement indiqué que le pays vivait un massacre et de graves violations des droits de l’homme.
La majorité Fuji-fasciste du Congrès, qui prétendait « déplorer » les morts par balles, a cyniquement et incroyablement donné son aval à un cabinet criminel. Cela n’a fait qu’attiser la confrontation du gouvernement dictatorial avec un peuple soulevé d’impuissance et en colère.
Après le vote de confiance, la présidente Dina Boluarte, est apparue avec un discours d’une surprenante « ouverture », digne d’un monde parallèle et en paix. Elle a également regretté le nombre de morts, sans toutefois demander pardon, en indiquant qu’elle ne comprenait pas la contestation contre son gouvernement et que tout cela était le fait d’un groupe très réduit de rebelles terroristes et misogynes.
Il est aujourd’hui corroboré que la droite a conspiré avec Dina Boluarte pour supplanter le vote populaire par un coup d’état militaire caché derrière un congrès qui se prétend démocratique. Il semble que tout cette manœuvre – l’utilisation d’une « justice » politisée – est une nouvelle modalité imposée par le Département d’État américain à l’Amérique latine. Particulièrement dans les pays dont les gouvernements ne sont pas des « amis ». Les violents coups d’Etat militaires directs du siècle derniers sont trop « visibles ». Au Pérou, l’objectif fondamental de cette version moderne de la Doctrine Monroe est la sinistre ambition de contrôler le pouvoir de l’État en devenant actionnaire tutélaire du pillage, celle des entreprises transnationales. N’oublions pas qu’en 2023, les concessions minières, les contrats d’extraction de gaz et la concession de Telefonica expireront. Ces « contrats-lois » ont été signés après le coup d’état d’Alberto Fujimori (1992) et sa nouvelle constitution de l’année 1993. Cette dernière permet aux transnationales de spolier le pays et ses ressources naturelles au-dessus des lois, sans payer des impôts et sous la bénédiction et protection du congrès. Dans un pays aussi riche en ressources naturelles que le Pérou, les grandes transnationales cherchent à obtenir le renouvellement des contrats et des concessions pour les 40 prochaines années.
Un discours gouvernemental propagé par une presse corrompue
Aujourd’hui, le pays est divisé et paralysé, avec près de la moitié du territoire national sous état d’urgence. La démocratie et l’État de droit se sont effondrés. Le gouvernement actuel stigmatise et accuse les centaines de milliers de manifestants d’être des « vandales », des « criminels », des « terroristes (terrucos) » directement financés par le trafic de drogue, l’exploitation minière illégale, la contrebande et des gouvernements étrangers (comme la Bolivie, Cuba, le Venezuela, le Mexique, etc.), jetant ainsi de l’huile sur le feu des contestations sociales.
Le « terruqueo » (le fait d’accuser quelqu’un de terroriste) est un vieil outil de la droite péruvienne qui a été affiné pendant la période fujimoriste des années 1990. Il s’agissait d’identifier tout opposant, toute personne qui remettait en cause le régime, comme un terroriste confirmé ou potentiel afin de lui retirer ses droits civils fondamentaux de citoyen. Cela leur permettait d’arrêter, de violer, de torturer et même de faire disparaître la personne incriminée. Aujourd’hui, la droite au pouvoir utilise ce moyen facile d’accuser n’importe qui pour le stigmatiser et l’éliminer en termes de capital culturel et socio-politique.
Le racisme et la discrimination sont constants contre les manifestants dans le pays, notamment dans les zones andines. À Lima, on observe une plus grande retenue dans l’usage de la force car le gouvernement sait qu’il est plus facile d’y dénoncer d’éventuels abus. En revanche, dans les régions où l’État est moins présent, où vit la population indigène la plus marginalisée, la violence n’est pas contenue, elle y est même exacerbée. La vie des habitants de Lima, où un seul mort a été recensé jusqu’à présent, semble avoir plus de valeur.
Après des centaines de personnes blessées, une soixantaine de morts dont douze personnes par impact de balle, la version officielle de l’État nous dit que « les manifestants se sont entretués » avec des armes de provenance bolivienne et une grande partie des médias de Lima réaffirme ce récit afin de justifier la répression et de déshumaniser les manifestants. La phrase, « celui qui contrôle le passé contrôle l’avenir ; celui qui contrôle le présent contrôle le passé » du roman 1984 de George Orwell a inspiré l’ambassade du Pérou aux États-Unis. Dans un tweet du 28 janvier, destiné à la communauté internationale, intitulé #8Vérités sur la situation politique au Pérou, le ministère des Affaires étrangères a tenté d’imposer un récit de la terreur propagée par les manifestations « violentes et criminelles ». Des contestataires bien évidemment qui n’ont pas de légitimité et donc que le gouvernement peut réprimer comme il le désire. Au niveau international également, ils ignorent le droit de la presse alternative à rendre compte à sa manière. Au niveau intérieur du pays, plusieurs journalistes, ceux qui ne se plient pas à la propagande gouvernementale, qui critiquent la gestion de cette crise ou qui ont pu documenter notamment l’assassinat par l’armée des manifestants à Ayacucho, sont eux aussi accusés de complicité avec le terrorisme. Ils sont souvent maltraités par la police lors de la couverture des manifestations. « Expliquer qu’on ne peut pas banaliser le terme terroriste est devenu une activité à haut-risque au Pérou », disait la journaliste Rosa Maria Palacios, qui se dit pourtant ouvertement de tendance libérale, catholique et conservatrice.
La preuve que les manifestants sont financés par le terrorisme et le crime organisé n’existe pas, mais elle est fabriquée quotidiennement grâce au pouvoir des médias. A force de répétitions, une série de mensonges et de diffamations ce sont ancrées dans la conscience d’une partie de la société péruvienne, qui a perdu la lucidité en prétendant qu’il est « normal de tuer des gens parce qu’il s’agit de terroristes… ».
Fin janvier, la ministre des Affaires étrangères Ana Cecilia Gervasi, a rencontré le New York Times à l’occasion d’un déplacement à Washington pour « développer et renforcer les relations bilatérales ». Le journal lui a demandé quelles preuves elle avait que les manifestations étaient financées par le crime organisé. Elle a répondu de manière absurde : « Nous n’avons pas de preuves, mais nous sommes sûrs ».
Les premières conclusions d’Amnesty International
Le 17 février, Erika Guevara Rosas, directrice d’Amnesty International pour les Amériques, a présenté les premières conclusions de son enquête à la présidente Dina Boluarte. Elle a mis en évidence le recours illégitime à la force et l’utilisation d’armes létales, qui mettent indistinctement la vie des gens en danger. Cet usage abusif de la force constitue une attaque généralisée contre la population qui est un crime au regard du droit international. Les autorités ont des responsabilités pénales, non seulement celles qui ont commis les crimes, mais aussi celles qui, par omission ou par ordre, ont permis que ces crimes se poursuivent.
La Présidente Dina Boluarte a souligné qu’elle n’a jamais donné l’ordre d’utiliser des armes mortelles. Cependant, elle sait, sans l’admettre, qu’elles ont été utilisées. Les preuves accumulées de leur utilisation sans discernement ne sont que trop évidentes, voire même irréfutables, selon de récents reportages indépendants. Amnesty International nous parle d’une « …répression meurtrière, preuve d’un mépris envers les populations autochtones et paysannes », notamment dans les régions d’Apurimac, Ayacucho et Puno.
Quelle a été la réponse concrète du gouvernement et du congrès ? Tout d’abord, le 21 janvier plus de 500 policiers sont intervenus à l’université d’État de San Marcos pour expulser ses étudiants et des manifestants qu’ils hébergeaient venus des régions andines pour « faire tomber le gouvernement de Lima ». Le rapport de la police indique que 192 personnes ont été arrêtées pour usurpation aggravée, délits contre la propriété et vol aggravé, et que quatre personnes ont été arrêtées pour terrorisme dont un étudiant qui avait eu le malheur d’avoir le Capital de Marx dans sa bibliothèque.
Dans le même temps, deux membres du Congrès, l’un d’Avanza País, Alejandro Cavero et sa collègue d’Acción Popular, María del Carmen Alva, ont souligné que le gouvernement devrait appliquer « des mesures plus drastiques » contre les manifestants, et le premier ministre Alberto Otárola donnait une prime spéciale à la police nationale, pour son « … immense sacrifice et professionnalisme… ».
Récemment, la députée Norma Yarrow, du parti Avanza Pais, a exposé ouvertement les préjugés des élites à l’égard du peuple andin, en déclarant que « les gens des provinces n’ont pas la capacité de comprendre qu’une assemblée constituante ne leur fournira pas de nourriture ». Lors d’un débat parlementaire, on a également entendu le député de Fuerza Popular Juan Carlos Lizarzaburu remettre en cause le terme « originario » et dénigrer le drapeau Wiphala, symbole des peuples indigènes. « Arrêtons de parler d’origine et [du] drapeau du Tahuantinsuyo (…), le Wiphala, cette nappe de chifa (un restaurant chinois), [qui] a été adopté par certains socialistes boliviens haineux. Arrêtons de parler d’origines et de bêtises qui n’ont rien de productif pour notre pays ». Encore plus ignoble, le banc d’Avanza País, en accord avec d’autres partis de droite, vient de proposer une amnistie pour l’armée et la police.
Le 18 février, le Premier ministre Alberto Otárola assure que les militaires « ne tirent pas de balles » contre les manifestants, contredisant ainsi le rapport d’Amnesty International. Le même jour, le groupe parlementaire Renovación Popular présente une initiative demandant à l’exécutif d’engager « rapidement et de toute urgence » la procédure de dénonciation de la Convention américaine et, par conséquent, le retrait du Pérou de la « juridiction contentieuse » de la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CIDH). Au même moment, dans un communiqué, le ministère de la Justice et des droits humains (un euphémisme) indique rejeter le rapport d’Amnesty International sur la répression des récentes manifestations : « Le gouvernement (…) est catégorique en affirmant qu’il n’existe au Pérou ni une politique de violation massive et systématique des droits de l’Homme, ni ce qui a été qualifié de ‘racisme systémique’ dans les actions des différentes autorités ».
Enfin, le 19 février, comme une cerise sur le gâteau, le prix Nobel de littérature, Mario Vargas Llosa, a écrit une lettre à la nouvelle présidente. Désormais membre de l’Académie française, il met sa notoriété au service du gouvernement de Dina Boluarte et de sa gestion de la crise sociopolitique par les forces de l’ordre. Pas un mot sur les morts et les blessés.
Alors que Margot Palacios, députée de Peru libre au Congrès, revient d’Europe où elle a rencontré des députés de plusieurs gouvernements et surtout porté plainte en Suisse contre la répression sanglante au Pérou devant la Cour pénale internationale, elle s’est faite accusée à son retour par la droite de complicité avec le Sentier lumineux, puissant groupe terroriste des années 1980 et dissout depuis longtemps. Palacios vient de publier une déclaration où elle remet en cause la proposition de retirer le Pérou de la Cour interaméricaine des droits de l’homme : « Face aux exécutions extrajudiciaires qui ont commencé en décembre dernier et qui se poursuivent sans aucun signe de solution, ils cherchent une fois de plus à dissimuler et à entraver la justice nationale et internationale ». Pour Palacios, ce gouvernement tente d’éviter d’être traduit en justice, « transformant le pays en une autarcie anachronique et un paradis pour les violeurs des droits de l’homme ».
Un synopsis catastrophique pour la démocratie péruvienne
Les manifestants exigent un changement fondamental de la structure de l’État, où la démocratisation va de pair avec la décentralisation et l’autonomie régionale. L’objectif est de briser l’énorme centralisme de Lima, qui ne s’explique pas par sa croissance excessive. Celle-ci est mise en évidence par le produit intérieur brut (PIB) et la dépendance absolue des gouverneurs régionaux. En effet, selon l’Institut national de la statistique et de l’informatique (INEI), la méga-région de Lima absorbe 46,5 % du PIB national. Elle est suivie de chiffres divisés par dix en moyenne : Arequipa avec 6,1% ; Ancash 5,2% ; La Libertad 4,9% ; Piura 4,3% ; Cusco 3,8% ; Ica 3,3% ; Junín 3,1% ; et dans cet ordre, suivent par ordre décroissant Cajamarca, Moquegua, Lambayeque, Loreto, Puno, etc. Dans ce dernier département, où plus de vingt personnes ont été assassinées et où la colère est immense, l’exploitation minière est importante, mais cette richesse ne reste pas dans la région. Une telle disproportion nous montre la dépendance totale des régions au centralisme dominant de Lima et la marginalité des peuples indigènes andins et amazoniens.
Deux mois et demi après le début des manifestations, l’exécutif, le Congrès, les procureurs, les juges, les militaires et la presse agissent en hors-la-loi.
L’insurrection citoyenne ne lutte pas pour des revendications sociales ou économiques ou pour des travaux publics, mais pour un changement politique, économique et social de fonds. C’est pour cela qu’ils ont voté pour Pedro Castillo et l’ont élu président. Ils luttent pour une véritable démocratie et un État de droit respecté par tous, ils luttent pour la souveraineté nationale et l’autodétermination du peuple. Ils luttent également contre l’État mafieux et ses membres qui font et défont la nation à leur guise, accumulant des fortunes et des privilèges.
Les marches et les protestations régionales ne veulent pas de l’aumône de l’État mafieux, mais des solutions politiques durables, c’est-à-dire de grande envergure, qui terminent par faire disparaître les structures sociales de l’exploitation capitaliste insatiable et débridée. Pour ces raisons, la solution politique à la crise réside dans la refondation d’une nouvelle République dont les fondements doivent être inclusifs, intégrant les peuples autochtones à la vie nationale sur un pied d’égalité et avec des droits de citoyenneté égaux. L’État de droit doit être rétabli, avec l’égalité de tous devant la loi, les pleines libertés individuelles et sociales et le respect sans restriction des droits de l’homme.
Ces manifestations au Pérou sont inédites et surprenantes par leur durée, leur simultanéité et l’absence de leaders politiques ou civils visibles. Les manifestants, pour la plupart issus des régions andines et exclus du progrès économique, sont confrontés à un secteur urbain excluant qui les confronte à la stigmatisation et à la répression. Le gouvernement ne cesse d’appeler au dialogue, mais qu’a fait Dina Boluarte pour créer de tels espaces ? Comment prétendez-vous établir la confiance pour le dialogue quand votre gouvernement tire et tue des gens ? Avec qui prétendez-vous dialoguer ? Les conditions ne sont pas réunies aujourd’hui. D’où l’apparent dialogue de sourds : « nous voulons négocier », répète le gouvernement, « nous voulons que vous partiez » dit le peuple.
Depuis le mois de janvier le législatif et l’exécutif se sont renvoyé la balle face à la demande d’élections anticipées. La présidente Boluarte, submergée dans ses mensonges, confirme que son gouvernement n’est pas de transition et qu’elle ne compte pas démissionner. De plus le Premier ministre vient de déclarer que si le congrès ne sollicitait pas les élections anticipées, la présidente (non élue faut-il le rappeler) resterait jusqu’à la fin de son mandat, c’est-à-dire juillet 2026.
Deux derniers éléments de cette dernière semaine sont absolument à signaler. Le premier, c’est la proposition du gouvernement d’alourdir les peines de prison ferme pour les manifestants accusés de délits pouvant aller jusqu’à 15 ans (la durée certaines peines déjà existantes ont été multipliées par trois). Le deuxième vient du Ministère de la justice qui propose d’indemniser à hauteur de 12 000 euros les familles des défunts morts durant les manifestations et de 6 000 euros les blessés graves. Il est évident que le gouvernement veut ainsi se laver les mains en achetant les consciences tout en voulant intimider les personnes qui voudraient continuer à manifester. Cette utilisation de la justice à des fins politiques et à géométrie variable doit être dénoncée à l’international.
Il semble évident que ni la force brutale de la dictature de Dina Boluarte, ni le Congrès et les Forces armées, ne permettront de trouver une solution à la crise sociopolitique. Oui, la démission de la présidente et des élections anticipées s’impose pour dénouer la situation actuelle. Les problèmes sont nombreux, ceux liés au système politique, à la constitution, au système électoral mais aussi aux difficultés sociales d’exclusion, de pauvreté, de racisme historique. Avec deux blocs socioculturel/économiques qui s’affrontent, il est nécessaire d’avoir un gouvernement provisoire indépendant, autonome et impartial pour gérer l’administration publique. Un nouveau pacte social est indispensable, discuté et accepté par tous les citoyens, au travers sans doute d’une assemblée constituante. Au Pérou, l’égalité entre individus et la paix sociale n’ont que trop tardé.