Le 22 février 2021, plusieurs centaines de milliers de manifestants ont défilé dans les rues algériennes. Les associations des droits de l’homme rapportaient jusqu’à 800 000 personnes dans les rues, rassemblées suite à des appels relayés sur les réseaux sociaux. Deux années après le début du Hirak, les Algériens continuent à battre le pavé pour réclamer des réformes politiques et institutionnelles. Le coronavirus et les restrictions sanitaires ne parviennent pas à étouffer les revendications. La répression non plus.
A l’approche du 2ème anniversaire du mouvement populaire qui a mis fin aux années Bouteflika, le président Abdelamadjid Tebboune, a tenté de désamorcer le mécontentement général en graciant plusieurs détenus d’opinion et en promettant de nouvelles élections.
Après des mois d’absence (il était soigné en Allemagne et est resté silencieux pendant des semaines), il doit faire face à une mobilisation sans précédent qui lui rappelle que les réponses apportées jusqu’à présent sont insuffisantes.
Les Algériens n’ont pas renoncé
En effet, le mouvement du Hirak, à la fois jeune et féminin, vient de faire la démonstration qu’il est toujours actif. Les jeunes sont particulièrement mobilisés. Les manifestants demandent la mise en place d’un gouvernement civil et non militaire. Partout dans le monde, des personnes se sont réunies pour célébrer l’anniversaire du Hirak et confirmer la détermination du peuple algérien. Ce fut le cas notamment à Paris et Montréal ou encore à Marseille, où des ressortissants algériens ont manifesté souvent accompagnés de militants des droits de l’homme.
2019 : un peuple qui se soulève mais une révolution inaboutie
En 2019, Jean-Luc Mélenchon avait consacré plusieurs billets à l’analyse de la situation algérienne. Il avait notamment écrit :
« Les évènements en cours en Algérie forcent l’attention. Ils ont pris une puissance et ils écrivent une histoire qui ont une valeur en état d’instruire et d’inspirer partout dans le monde. À mes yeux, ils se déroulent sur le canevas des révolutions citoyennes dont les prototypes sont apparus en Amérique du sud à la fin du siècle précédent et au début de celui-ci. Le modèle s’était conforté dans le process de la révolution Tunisienne. Jusqu’à cette étape-ci, la révolution citoyenne en Algérie fonctionne dans une forme quasi chimiquement pure. On reconnait en elle les traits communs des autres mouvements insurrectionnels de ce type. Mais elle les affiche avec une puissance qui met tous les traits connus à nu. Et ils prennent en Algérie une forme plus claire et nette que dans bien d’autres cas auparavant. »
Source : La nouvelle révolution, Jean-Luc Mélenchon
En 2019, le Hirak avait permis la fin de la longue page d’Abdelaziz Bouteflika au pouvoir. S’il fallait faire un bilan des deux années qui ont suivi, celui-ci serait mitigé : le départ du président contesté avant son cinquième mandat n’a pas entrainé la mise en œuvre des autres espérances qui animaient les manifestants. Les manifestants souhaitaient également la mise en place d’un gouvernement de transition, d’une assemblée constituante ou des élections anticipées. Ces demandes ont été rejetées par l’armée au nom de la stabilité. Elle avait fini par menacer la population qui restait mobilisée en procédant à des arrestations de nombreuses figures du mouvement, certaines ont été condamnées très lourdement.
Les organisations de défense des droits humains notamment Amnesty International avaient pointé du doigt le poids de cette répression. Amnesty avait dénombré pas moins de 300 arrestations arbitraires, 150 personnes arrêtées en marge des manifestations. Pas moins de 2 500 arrestations ont été recensées par le Comité national pour la libération des détenus, parmi eux des journalistes et des cybermilitants. La répression se passe aussi sur les réseaux sociaux où des contenus pro-Hirak sont censurés, des comptes pris pour cible par les adversaires du hirak.