Cet article fait partie du dossier Les luttes syndicales

Le Monde en commun publie des articles et contenus audiovisuels accessibles dans 3 langues : français, anglais, et espagnol. L’objectif est de rendre accessible tous les contenus au plus large public. Pour cela, la langue ne doit pas être un obstacle.

Nous sommes en train de constituer un groupe de volontaires qui se chargeront de traduire l’ensemble des contenus afin de les présenter dans au moins trois langues (français, anglais, espagnol).

Si vous souhaitez rejoindre le groupe, merci de nous adresser un mail à contact@linternationale.fr 

Construire des coopérations internationalistes : le modèle du syndicalisme international

Pour qu’une société humaine puisse perdurer elle doit avoir pour projet la coopération entre ses membres. Pourtant la mondialisation de la production et des échanges s’est largement développée sur la mise en concurrence des travailleurs et les normes qui les protègent. Elle transforme les équilibres sociaux-économiques et les modes de régulations en affaiblissant considérablement les États.

lire la suite >

 

Le vent de la révolte se poursuit en Inde, 250 millions de travailleurs en grève !

L'Inde est peuplée par 1,353 milliard de personnes (selon les données de 2018). Depuis le 8 janvier 2020, les travailleurs, étudiants ainsi que d'autres parties de la population se mobilisent contre les réformes antisociales et antisyndicales du gouvernement. Depuis le mois de novembre, ce sont les agriculteurs qui s'opposent à la libéralisation de leur secteur qui font face à la répression sans faiblir. Près de 20% de la population du pays est mobilisée ou 2% de la population mondiale. Marina Mesure revient sur ces journées de lutte, les causes profondes de la crise qui donnent lieu à un mouvement de masse !

« Nous ne céderons pas aux politiques libérales du gouvernement Modi » : l’appel est clair. Depuis bientôt un an, l’Inde connait une mobilisation sans précédent de dizaines de millions de travailleurs, étudiants, paysans unis contre les réformes antisociales menées d’une main de fer par le gouvernement.

Ni la répression policière, ni la pandémie du Covid-19 n’ont pu ébranler la détermination des 250 millions de travailleurs en grève générale le 26 novembre. Il s’agit de la seconde journée d’action la plus importante après celle du 8 janvier, qui vit déjà converger plus de 200 millions de personnes.

« La semaine dernière, la plus grande grève organisée de l’histoire de l’humanité a fermé l’Inde. 250 000 000 de personnes ont été frappées contre les réformes néolibérales du Premier ministre indien Narendra Modi dans le secteur agricole. »

2% de la population mondiale en grève : l’évènement est historique 

Employés des banques et des télécommunications, du transport, fonctionnaires, ouvriers de la sidérurgie, dockers, techniciens du secteur de l’énergie, mineurs, cueilleuses des plantations de thé, paysans : ils ont mis le pays à l’arrêt. Il faut dire que les motifs de la convergence des luttes sont nombreux en Inde. Parmi les principaux, plusieurs revendications concernant l’accès aux services publics après les annonces du gouvernement de privatiser le secteur de l’énergie et des transports, notamment les chemins de fer.

L’exigence de nationalisation du secteur de la santé pour garantir l’accès aux soins se fait aussi pressante alors que l’Inde enregistre plus de 9,2 millions de personnes infectées par la Covid19 et près de 135000 décès. Sans compter la bataille pour la gestion publique de l’eau, dans un pays confronté à des privatisations depuis les 15 dernières années qui ont eu des conséquences dramatiques sur les coûts, l’approvisionnement et la qualité de l’eau. La grande masse de la population indienne se trouve donc sévèrement entravée quand il lui faut accéder aux réseaux collectifs essentiels pour vivre dignement.

S’ajoute à cela une longue série de politiques d’austérité qui ont fait rapidement basculer la colère populaire en énergie mobilisatrice. Selon une enquête du Centre pour l’emploi durable de l’université Azim Premji, 66 % des salariés interrogés ont perdu leur emploi durant le confinement, 77 % des ménages consomment moins de nourriture qu’avant et 64 % ont vu leurs revenus diminuer. Et pour cause, plusieurs États alliés du parti de Modi ont décidé de suspendre pour trois ans le Code du travail au nom de la relance économique et de l’attraction des capitaux étrangers[1]. Une suspension par ordonnances visant à « exempter toutes les entreprises, usines et fonds de commerce de l’application du droit du travail »[2]. Pénicaud conseille-t-elle le gouvernement indien ou est-ce l’inverse ? Toutes les législations relatives aux conditions de travail (temps de travail, salaire), règlement des conflits, à la santé et sécurité, à la reconnaissance des syndicats ont disparu.

Pour Ramapriya Gopalakrishnan, avocat spécialiste du droit du travail, « l’esclavage fait son retour en Inde ».

Une réforme du secteur agricole qui ne passe pas…

Après les réformes antisociales et antisyndicales, c’est au tour des réformes anti-paysannes[3], avec l’adoption en septembre de trois lois visant à la libéralisation de la commercialisation des produits agricoles dans un pays où les paysans représentent 50 % de la population. Jusqu’alors, les agriculteurs vendaient leurs récoltes sur les marchés régionaux, régulés par les autorités locales.

Désormais les entreprises pourront passer des contrats d’exclusivité avec les producteurs à prix libres. Rien ne les empêche de stocker les denrées pour une durée illimitée et d’organiser la spéculation. La fin de l’encadrement des prix des produits agricoles par les pouvoirs publics aura à coup sûr de terribles conséquences sur les moyens de subsistance des paysans.

C’est donc un front uni de 250 organisations d’agriculteurs s’opposant à l’entrée de l’Inde dans l’ère de l’agro-business qui a rejoint la lutte. Par dizaines de milliers, des paysans de plusieurs États ont commencé à marcher vers New Delhi, lieu du pouvoir. Ils ont été reçus par la police, qui a dressé des barricades et bloqué les entrées dans l’Etat en utilisant des canons à eau, gaz lacrymogène, drones de surveillance et qui a procédé à des arrestations arbitraires massives des manifestants. Malgré tout, ils continuent à converger par milliers vers la capitale.

Ainsi, sous les radars médiatiques mondiaux, le mouvement social en Inde ne faiblit pas avec le monde du travail en première ligne de la défense des droits fondamentaux.  


[1] https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20200522-inde-les-syndicats-protestent-contre-la-suspension-code-travail         

[2] https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/05/12/coronavirus-l-esclavage-fait-son-retour-en-inde-qui-sape-son-droit-du-travail_6039428_3234.html

[3] https://peoplesdispatch.org/2020/11/27/250-million-people-participate-in-nationwide-strike-in-india/

Dans le même dossier

Le mouvement de syndicalisation initié l’année dernière à Starbucks ne cesse de gagner en ampleur malgré les tentatives du groupe, à la limite de la légalité, pour mettre fin à ces velléités syndicales. L’entreprise états-unienne s’est par ailleurs attirée les critiques de Bernie Sanders qui dénonce le comportement adopté par l’entreprise.
« D’après ce rapport, l’accord UE-Mercosur aurait une grande part de responsabilité dans la déstabilisation accrue des marchés agricoles. En effet, il occasionnerait « la plus forte importation de produits agricoles » sur des marchés déjà saturés et alors que les agriculteurs peinent déjà à vivre de leur métier. En échange, il prévoit la suppression des droits de douane sur 91% des biens exportés vers le Mercosur. À quel prix ? Outre l’accroissement des émissions de gaz à effet de serre qu’il provoquerait, un autre rapport d’experts évoque une hausse de 5 % de la déforestation du fait de l’augmentation de la production bovine » écrivait Jean-Luc Mélenchon en février 2021. Depuis la publication du rapport, une coalition internationale qui regroupe 450 organisations s’est constitués : un communiqué, des vidéos et des pétitions, ce projet d’envergure vise à s’opposer à l’accord de libéralisation du commerce UE – Mercosur. Plus de 2 millions de personnes ont déjà signé les pétitions pour s’opposer à ce projet écologiquement et socialement dévastateur.

Partagez !

Marina Mesure

Syndicalisme international

Marina Mesure is a specialist of social issues. She has worked for several years with organizations defending workers’ rights such as the European Federation of Building and Wood Workers.

She has campaigned against child labor with the International Labor Organization, against social dumping and the criminalization of unionism. As a famous figure in the international trade union world, she considers that the principle of “equal work, equal pay « remain revolutionary: between women and men, between posted and domestic workers, between foreigners and nationals ».

Marina Mesure, especialista en asuntos sociales, ha trabajado durante varios años con organizaciones de derechos de los trabajadores como la Federación Europea de Trabajadores de la Construcción y la Madera.

Llevo varias campañas contra el trabajo infantil con la Organización Internacional del Trabajo, contra el dumping social, y la criminalización del sindicalismo. Es una figura reconocida en el mundo sindical internacional. Considera que el principio de « igual trabajo, igual salario » sigue siendo revolucionario: entre mujeres y hombres, entre trabajadores desplazados y domésticos, entre extranjeros y nacionales « .

Spécialiste des questions sociales, Marina Mesure travaille depuis plusieurs années auprès d’organisations de défense des droits des travailleurs comme la Fédération Européenne des travailleurs du Bâtiment et du Bois.

Elle a mené des campagnes contre le travail des enfants avec l’Organisation internationale du travail, contre le dumping social, la criminalisation du syndicalisme. Figure reconnue dans le monde syndical international, elle considère que le principe de « travail égal, salaire égal » est toujours aussi révolutionnaire : entre les femmes et les hommes, entre les travailleurs détachés et domestiques, entre étrangers et nationaux ».

Sophia Chikirou

Directrice de la publication

Sophia Chikirou is the publisher of Le Monde en commun. Columnist, director of a documentary on the lawfare, she also founded several media such as Le Média TV and the web radio Les Jours Heureux.

Communications advisor and political activist, she has worked and campaigned in several countries. From Ecuador to Spain, via the United States, Mexico, Colombia, but also Mauritania, she has intervened with progressive and humanist movements during presidential or legislative campaigns.

In 2007, she published Ma France laïque (La Martinière Editions).

Sophia Chikirou es directora de la publicación de Le Monde en commun. Columnista, directora de un documental sobre el lawfare, también fundó varios medios de comunicación tal como Le Média TV y la radio web Les Jours Heureux.

Asesora de comunicacion y activista política, ha trabajado y realizado campañas en varios países. Desde Ecuador hasta España, pasando por Estados Unidos, México, Colombia, pero también Mauritania, intervino con movimientos progresistas y humanistas durante campañas presidenciales o legislativas.

En 2007, publicó Ma France laïque por Edicion La Martinière.

Sophia Chikirou est directrice de la publication du Monde en commun. Editorialiste, réalisatrice d’un documentaire sur le lawfare, elle a aussi fondé plusieurs médias comme Le Média TV et la web radio Les Jours Heureux.

Conseillère en communication et militante politique, elle a exercé et milité dans plusieurs pays. De l’Equateur à l’Espagne, en passant par les Etats-Unis, le Mexique, la Colombie, mais aussi la Mauritanie, elle est intervenue auprès de mouvements progressistes et humanistes lors de campagnes présidentielles ou législatives.

En 2007, elle publiait Ma France laïque aux éditions La Martinière.

Nous utilisons des cookies pour vous garantir la meilleure expérience sur notre site. Si vous continuez à utiliser ce dernier, nous considérerons que vous acceptez l'utilisation des cookies.