La mobilisation n’aura pas suffi. Le Parlement a écarté l’amendement de Caroline Roose et Grace O’Sullivan (groupe Verts/ALE) interdisant le chalutage de fond dans les aires marines protégées. Cet amendement était présenté dans le cadre d’un rapport sur l’économie de la mer prochainement transmis à la Commission européenne. Cet échec pour les organisations environnementales est un succès de plus pour les lobbies de la pêche. Le soutien apporté à la mesure par les écologistes et le Groupe de la Gauche au Parlement européen (duquel La France insoumise est membre) n’auront pas été suffisants face à l’opposition des conservateurs, des élus d’extrême droite mais également du groupe Renew et ses eurodéputés de La République en marche.
L’ONG Bloom avait pourtant menée une campagne de sensibilisation sur la question de ces aires marines protégées, s’exprimant dans la presse au travers de la parole de Claire Nouvian, sa présidente. La pétition destinée à attirer l’attention d’Emmanuel Macron a ainsi réussi à réunir plus de 40 000 signatures, sans succès. Pire, les eurodéputés macronistes avaient proposé leur propre amendement d’un cynisme rapidement épinglé par l’association. Le texte avait été déposé par Pierre Karleskind qui dirige la commission de la Pêche au Parlement, et cosigné par Stéphane Séjourné, deux députés français membres de Renew. Plutôt que d’arrêter les pêches destructrices dans les AMP, il interdisait ces pêches dans les zones de protection stricte. Des zones ou de telles pratiques sont pourtant déjà proscrites. Malgré le tollé, l’amendement sans ambition a été présenté puis adopté avec 319 voix pour et 280 voix contre. C’est l’adoption de ce texte qui a permis au Parlement de ne pas se prononcer sur le texte écologiste.
Contrairement à ce que laisse penser la terminologie employée pour les désigner, les aires marines protégées sont en grande partie ouvertes à la pêche, et le regard doit se tourner vers les zones de protection stricte pour y noter l’absence de chalutiers. 30 % des eaux françaises sont aujourd’hui des AMP mais seulement 1,6 % sont pleinement protégées des interventions de l’homme selon une étude publiée en 2021. 80 % de ces dernières se trouvent au large des terres australes françaises, au sud de l’océan Indien. Des zones faiblement visitées mais hautement protégées qui gonflent artificiellement l’image de bon élève qu’aime à diffuser Macron à l’étranger. Celui-ci avait d’ailleurs promis en meeting à Marseille d’aller « deux fois plus vite » dans sa lutte pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
C’est que derrière cette question de la pêche au fond se cache un véritable problème environnemental identifié par les organismes de recherche. Au-delà de la question de la surexploitation des ressources halieutiques (avec une pêche qui ratisse largement sans distinction), se trouve tout le sujet de la captation de CO2 par les fonds marins. En raclant le fond de la mer, les chalutiers libèrent le carbone qui y est attrapé. Ajoutons à cela la grande quantité d’énergie libérée par des navires gourmands en essence. La pêche au fond se caractérise donc comme une pratique polluante, qui nuit gravement à la biodiversité. Un coup supplémentaire porté au climat par La République en marche, un groupe désormais habitué de ces faits d’arme.