Bastien Lachaud est membre de la commission de la défense de l’Assemblée nationale et « parmi les plus bosseurs » selon les mots du journaliste et blogueur spécialisé Jean-Marc Tanguy. A ce titre il suit particulièrement les questions spatiales et avait été invité par la Fédération Astronautique Internationale (IAF) à s’exprimer lors du 72ème Congrès Astronautique International qui se tenait cette année à Dubaï du 25 au 29 octobre. Se refusant à faire un tel déplacement pour un unique événement, la décision avait été prise d’en profiter pour examiner l’action de la France dans la région, l’un des points les plus chauds du monde. En lien avec les ambassades en Oman et aux Émirats, un programme de rencontres et de visites fut rapidement mis sur pied : l’occasion d’en savoir plus, de rencontrer certains dirigeants et également de faire connaître la singularité insoumise à des interlocuteurs qui n’ont souvent de la France qu’une image, celle de Macron.
Le voyage commence donc à Dubaï. Bastien Lachaud y retrouve deux collègues parlementaires, la sénatrice Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques et le sénateur Claude Raynal, président de la commission des finances. Il est donc seul pour représenter l’Assemblée nationale d’un des pays les plus avancés dans le domaine spatial… Le Congrès est l’occasion de discussions avec des personnalités étrangères, des experts, les dirigeants du Centre National d’Etudes Spatiales (CNES) et de se tenir au fait des projets des différentes agences spatiales dans le monde. Le domaine est en plein « boum » : après les Etats pionniers, de nouveaux acteurs arrivent tels que les Emirats eux-mêmes et bien sûr les « startup » du New Space dans le sillage des milliardaires comme Elon Musk. Les rivalités s’aiguisent, le risque de pollution, d’accidents et de conflits s’aggravent. La logique du capitalisme, la course au profit, entre en contradiction avec la logique de la science, la coopération au service du savoir et de l’intérêt général humain. Seule la volonté politique peut faire primer la seconde. Telle est en substance la thèse générale que Bastien Lachaud a défendue lors de ce congrès, parmi un panel de haut niveau, comptant notamment le président de l’Agence spatiale européenne, le ministre brésilien de l’Innovation et une ancienne ministre grecque. Il l’a illustré en démontrant comment une action spatiale planifiée dans la durée au niveau international pourrait permettre d’apporter des réponses aux grands problèmes de santé mondiaux et en particulier aux épidémies.
Profitant de sa présence à Dubaï, Bastien Lachaud s’est rendu à l’exposition universelle qui vient d’y ouvrir. L’événement est d’importance puisque les autorités émiriennes espèrent 25 millions de visite. La France a consacré un budget de plusieurs millions d’euros à un pavillon qui doit être une véritable vitrine du pays. L’exposition est en réalité un concentré de diplomatie culturelle ou autrement dit de « soft power ». On y lit les stratégies des différentes puissances et leurs ambitions sur la scène internationale : certains choisissent de montrer les muscles, d’autres font profil bas mais rien en tout cas n’est laissé au hasard. Dans ce jeu, le pavillon français emprunte un peu à tous les registres. L’excellence française dans maint domaine y est très bien représentée mais le message au monde est un peu flou ; assez emblématique finalement de la politique internationale des années Macron.
En Oman, le déplacement prend un tour plus officiel. Des rencontres avec les autorités omanaises ont été prévues. Le pays est très singulier dans la région. Il est un faiseur de paix très discret et néanmoins très actif. Alors que les tensions sont vives entre Arabie saoudite et Iran et que la guerre fait rage au Yémen, Oman est le repère de ceux qui tâchent de faire primer l’action diplomatique et la paix, par exemple pour les négociations sur le nucléaire iranien. C’est ce qu’ont rappelé aussi bien le vice-président de l’Assemblée représentative (Majliss Choura) que le vice-ministre des Affaires étrangères qui ont successivement reçu Bastien Lachaud. Cet accueil de haut-niveau symbolisait bien la disponibilité d’Oman pour des échanges plus nourris avec la France alors qu’aucun officiel français ne s’y était rendu de tout le quinquennat. Le déplacement du député insoumis a finalement quelque peu réparé l’indifférence qu’a choisie le gouvernement ces dernières années.
La visite a aussi été l’occasion de visiter le Collège national de défense et de rencontrer le général qui le commande. Oman est certes un pays pacifique et même pacifiste, il est cerné par des crises qui l’obligent à préparer sa défense sérieusement et en impliquant largement la population. Pour la France c’est aussi un client qui n’est pas toujours traité au mieux. Ne faisant pas la guerre, il ne dépense pas les sommes faramineuses de l’Arabie saoudite par exemple. C’est bien la raison pour laquelle il devrait être mieux considéré.
Enfin, les Omanais respectant scrupuleusement le repos des fins de semaine, Bastien Lachaud en a profité pour visiter le centre culturel franco-omanais, rencontrer des promoteurs de la francophonie dans ce pays où la communauté française ne compte quelques centaines de personnes et enfin pour visiter une mission archéologique française dont les résultats bientôt publiés ne manqueront pas d’étonner. Il a obtenu confirmation que le rayonnement et l’influence de la France dans le monde passe par ce genre d’échanges scientifiques et culturels, tout en vérifiant que les moyens font trop souvent défaut.
Dernière partie du voyage, Bastien Lachaud s’est rendu à Abu Dhabi, l’émirat-clé des Emirats Arabes Unis afin de rendre visite au forces françaises qui y sont stationnées. Leurs activités lui ont été présentées dans le détail. Leur rôle avait récemment été mis en lumière avec l’opération Apagan, qui a permis l’évacuation d’un peu moins de 3000 personnes d’Afghanistan. Sur ce sujet, Bastien Lachaud et les députés insoumis ont demandé que soit créé une commission d’enquête. En vain. Sur place, il a pu recueillir des informations sur les conditions de l’opération et la façon dont les forces armées comme le personnel de l’ambassade ont dû s’affairer en urgence avec des moyens somme toute modestes.
Une autre opération militaire a également retenu toute son attention, l’opération Agénor. Il s’agit d’une opération internationale visant à sécuriser la navigation dans le détroit d’Ormuz. Alors que les Etasuniens avaient choisi en 2019 de faire une démonstration de force face à l’Iran en choisissant une stratégie de « pression maximale », les Etats membres de l’opération Agenor ont préféré mener une action autonome visant simplement à rassurer les compagnies qui passent par le détroit. Cette fois encore, la visite a permis de mettre en lumière aussi bien le professionnalisme de ceux qui y participent que certaines faiblesses structurelles du dispositif.
Enfin, en guise de conclusion, Bastien Lachaud a rencontré l’ambassadeur de France à Abu Dhabi avec lequel il est revenu sur les différents aspects de la relation entre la France et les Emirats. Ils ont ensemble évoqué l’opposition manifestée de longue date par les députés insoumis aux ventes d’armes à l’Arabie saoudite et aux Emirats aussi longtemps que ceux-ci violent le droit international dans la guerre au Yémen. C’était d’ailleurs l’une des principales raisons pour lesquelles aucune rencontre avec les autorités émiriennes n’avait été organisée. Dans ce pays, c’est principalement la stratégie française que voulait examiner ce bon élève de la commission de la défense nationale.