Le succès sur le front de la lutte contre le réchauffement climatique s’éloigne. En effet, la hausse des températures moyennes en France a atteint 1,7 °C depuis 1900, « avec une accentuation sensible du réchauffement au cours des trois dernières décennies ». Pourtant, nous ne sommes pas dans les clous de l’Accord de Paris qui vise à limiter le réchauffement à +2 degrés. Le gouvernement se targue d’avoir atteint les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2019. « Mais il ne faut pas oublier que les plafonds d’émission avaient été relevés » a souligné la Présidente du Haut-Conseil en conférence de presse. Cette astuce gouvernementale fut en réalité un cache misère. Il y a urgence à accélérer les politiques d’atténuation du changement climatique.
Selon le Haut Conseil pour le Climat, la France doit « pratiquement doubler » le rythme de réduction de ses émissions de CO2 pour atteindre son objectif de -40% de réduction des émissions de gaz à effet de serre à horizon 2030. Dans le détail, les émissions du bâtiment, de l’industrie et de l’énergie ont légèrement baissé. Mais celles des transports stagnent et le secteur reste le premier émetteur avec 31 % des émissions. Pour finir, la moitié de l’empreinte carbone nationale provient des importations. Une bifurcation écologique radicale s’impose. D’autant plus que l’objectif national actuel est loin d’être ambitieux.
La recommandation du rapport est très claire : « La France doit rehausser son objectif de réduction des émissions visé pour 2030 ».
Ce couperet tranche avec le contenu du projet de loi Climat actuellement débattu au Parlement. Mises bout à bout, les mesures qu’il contient ne permettent d’atteindre que 10% de l’objectif global. Les auteurs du rapport ne sont pas dupes. Celui-ci est jalonné de vives critiques de l’action du gouvernement. D’abord, il tance la décision du gouvernement prise début 2020 d’exiger de chaque ministère une feuille de route climat. Cela « se concrétise trop lentement ». L’évaluation des lois au regard du climat à quant à elle « peu évolué depuis la publication [de son dernier rapport] sur le sujet ». Pour finir, le plan de relance est loin d’être vert. En effet, « l’essentiel de ses dépenses s’inscrit dans la continuité de l’action actuelle, avec une réduction insuffisante des émissions ».
Outre les politiques d’atténuation, les auteurs du rapport assument une position tranchée : il faut se préparer d’urgence à faire face aux conséquences d’ores et déjà irréversibles.
Pour cela, une vraie stratégie nationale d’adaptation au changement climatique est nécessaire. En effet, le rapport souligne que les deux-tiers de la population française sont déjà fortement ou très fortement exposés au risque climatique. Celui accroit l’intensifie et la fréquence d’évènements extrêmes. Par exemple, dans un climat non modifié par les bouleversements résultant des activités humaines, la vague de chaleur de septembre 2020 surviendrait seulement tous les 150 ans. Dans le climat actuel, elle aura lieu une fois tous les 12 ans.
Outre les vagues de chaleur, le rapport peint un tableau exhaustif des phénomènes auxquels nous seront confrontés. Par exemple, il mentionne des phases de gel dévastateur sur des floraison plus précoce de la végétation comme au mois d’avril dernier, une perturbation complète du cycle de l’eau induisant une alternance de sécheresses intenses propices aux incendies et de précipitations diluviennes ou encore des températures nocturnes élevées amplifiées par le béton des villes qui empêcheront les organismes de récupérer.
Nous nous dirigeons vers un quatrième été de sécheresse d’affilée.
Il y a donc urgence à mettre en œuvre un plan national pour protéger la ressource en eau et rendre nos villes vivables. Nous devons urgemment nous adapter à cette nouvelle donne climatique irréversible. En effet, comme le soulignent les auteurs du rapport, « il n’est pas possible de continuer à émettre des GES aux mêmes niveaux, en pensant qu’il sera possible de s’adapter à n’importe quel niveau de changement climatique. »
Pour l’heure, l’actuel plan national d’adaptation au changement climatique se compose selon eux d’une « soixantaine d’actions disparates ». La stratégie nationale d’adaptation doit être « dotée d’objectifs quantifiés et de délais précis, en identifiant des secteurs prioritaires ». Le contre-budget 2021 des députés insoumis paru en mars 2020 mettait déjà en avant cette nécessité. Cette adaptation doit revêtir plusieurs aspects.
Premièrement, il faut renforcer les réseaux et les infrastructures exposées aux évènements extrêmes tels des températures élevées ou des vents violents, mais aussi rénover les canalisations pour économiser l’eau. C’est ce que propose l’Avenir en Commun.
Deuxièmement, il faut se préparer à des situations de crise et d’urgence. La conscription citoyenne proposée par l’Avenir en Commun est une façon d’y répondre. Enfin, le rapport préconise de penser la planification de cette adaptation « en privilégiant la cohérence fonctionnelle de certains territoires, par-delà les limites administratives », c’est-à-dire en cohérence avec la réalité écologique et sociale du pays. Concrètement, « il peut ainsi être utile de travailler à l’échelle d’un bassin-versant, d’un corridor écologique, mais aussi d’un bassin agricole ou industriel, d’un bassin d’emploi ou d’un bassin de vie. » L’Avenir en Commun ne dit pas autre chose.
Le Haut Conseil pour le Climat et le programme de l’Avenir en Commun convergent tant sur le diagnostic que les solutions. Atténuation et adaptation ne sont pas opposées mais complémentaires : ce duo est la clé pour faire face à la phase d’incertitude écologique majeure dans laquelle nous entrons.