Par Christian Rodriguez, Filip Ristic, en collaboration avec notre correspondante au Mexique Donaji Alba
« Vous n’êtes pas seul, vous n’êtes pas seul ! », scandait la masse des gens venus le soutenir. « Pas de demi-mesures », a répondu Lopez Obrador, avant d’ajouter : « On n’obtient rien, et cela vaut au Mexique comme dans le monde entier, avec des demi-mesures. Les publicistes de la période néolibérale recommandent toujours aux candidats et aux gouvernants de se déplacer vers le centre, c’est-à-dire de s’entendre avec tout le monde. La noble fonction de la politique exige authenticité et définitions. Être de gauche, c’est s’ancrer dans ses idéaux et ses principes, ne pas se brouiller, ne pas zigzaguer ».
Pour des raisons d’agenda, le candidat présidentiel Jean-Luc Mélenchon, qui avait été invité à participer, n’a pas pu assister à cet événement. Durant celui-ci, le président AMLO a salué la présence des nombreuses délégations internationales présentes, dont celle de l’invité spéciale Dilma Rousseff, ex-présidente du Brésil. Il a également rappelé les efforts diplomatiques réalisés par le Mexique depuis le début de sa présidence, notamment pour accorder l’asile à l’ancien président de la Bolivie Evo Morales, ainsi qu’à de nombreux ex-dirigeants de l’Équateur.
Le discours a aussi été l’occasion d’annonces importantes. AMLO a entre-autres annoncé une hausse de 22 % du salaire minimum, dans le cadre d’un accord conclu entre syndicats, patronat et gouvernement. « Aujourd’hui, de manière concertée, les travailleurs, les employeurs et le gouvernement se sont mis d’accord sur une augmentation de 22 % du salaire minimum, ce qui signifie qu’il a augmenté [depuis le début du mandat] de 65 % en termes réels, ce qui n’était pas arrivé depuis plus de trois décennies », a annoncé le président Lopez Obrador.
Cette annonce a suscité de vives acclamations de la part des milliers de ses partisans réunis à Mexico. Il a ajouté que, dans la zone frontalière du nord du pays, cette augmentation a plus que doublé au cours de ce mandat de trois ans. AMLO a rappelé que son gouvernement a récupéré un million d’emplois perdus à cause de la pandémie, et que 300 000 emplois supplémentaires ont été créés.
Pour AMLO, « le plus important est que nous ayons jeté les bases de la transformation du pays ». Il ajoute : « Au cours de ces trois années, nous avons changé la mentalité du peuple comme jamais auparavant, avec la révolution des consciences. Le changement de mentalité est ce qui nous a conduit à l’essentiel. Ils peuvent revenir en arrière sur des choses matérielles, mais pas sur la conscience du peuple mexicain ».
« Si nous sommes authentiques, si nous disons la vérité et défendons les pauvres et la justice, nous conserverons notre identité. Et cela peut signifier la sympathie, non seulement de ceux qui sont en bas de l’échelle, mais aussi des personnes lucides et humaines des classes moyennes et supérieures, et cela suffit pour affronter les forces conservatrices, les réactionnaires. »
Avec émotion, le président a appelé la population à participer à l’exercice démocratique qui aura lieu l’an prochain. Un référendum révocatoire de mi-mandat, dans lequel le peuple sera appelé à se prononcer sur la suite de la présidence AMLO. Donner l’accord populaire pour qu’il continue son mandat jusqu’en 2024, comme prévu par la Constitution, ou refuser et mettre un terme à sa présidence dès 2022.
Le président s’en explique : « En avril prochain, nous allons tester à nouveau le soutien dont bénéficie notre politique de transformation, nous saurons si nous nous en sortons bien ou pas avec cette consultation. On demandera au peuple, qui est le souverain, celui qui est responsable, s’il veut que je continue à exercer la présidence ou que je démissionne. Il n’est pas question que je sois élu pour six ans et que je puisse faire ce que je veux. Non, le peuple doit garder le pouvoir entre ses mains à tout moment. C’est pourquoi j’appelle tous les Mexicains à participer, qu’ils soient militants de parti ou citoyens sans parti, afin de mettre en pratique la méthode de rappel du mandat jusqu’à ce qu’elle devienne une habitude démocratique ».
Ce discours a aussi été l’occasion pour lui de rejeter certaines accusations « selon lesquelles nous militariserions le pays, car elles manquent de toute logique et de la plus élémentaire bonne foi. Les forces armées n’ont pas reçu l’ordre de faire la guerre à qui que ce soit, ni de restreindre les libertés, et encore moins de s’engager dans des actions répressives ».
L’occasion de rappeler un aspect important de l’histoire mexicaine. « Les forces armées, ne l’oublions pas, sont nées avec la révolution mexicaine. Ce n’est pas une armée d’élite, elle n’appartient pas à l’oligarchie, elle n’est pas la même que les autres armées du monde », a déclaré AMLO.