Cet article fait partie du dossier La Paix

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La France doit être du côté de la paix au Proche-Orient

Quelques voitures tournent autour des rond-points, des klaxons et un fond sonore d'applaudissements. Ces images d’iraniens célébrant l'attaque de drones sur Israël ont fait le tour des réseaux sociaux. Mais les spécialistes sont formels : la population iranienne est majoritairement empreinte d'inquiétude et d'angoisse face à une possible  guerre.

Amine Snoussi est le collaborateur de Ersilia Soudais à l'Assemblée nationale. Journaliste de formation et auteur, il est spécialiste du Maghreb et du Moyen-Orient.

Depuis plus de six mois, le régime iranien est pris dans les tensions de sa politique étrangère, inséparable de sa politique intérieure. Pendant des décennies, il a fait de la destruction d’Israël un inacceptable fonds de commerce régional. Mais depuis le 7 octobre, l’Iran n’avait jamais menacé d’une quelconque attaque directe de l’Etat hébreu. Selon l’auteur et historien iranien Arash Azizi, contributeur régulier de la presse spécialisée étasunienne, l’activité des proxies iraniens à même diminué dans les six mois qui ont suivi le début de la guerre à Gaza. Mais après le bombardement de son ambassade à Damas par Israël, « le régime voulait sauver la face, sinon il n’aurait pas prévenu ses voisins (de la riposte lancée dans la nuit du 13 mars), ainsi que la Turquie et les Etats-Unis avec autant d’avance. Depuis le 7 octobre, le Hezbollah n’est plus un acteur majeur de la résistance palestinienne et Khomeini perd de son leadership en interne, surtout depuis le bombardement israélien du 1er avril sur l’ambassade iranienne à Damas, tuant sept gardiens de la Révolution dont deux commandants », a déclaré le même Azizi dans une interview accordée au Monde en Commun. L’auteur analyse que le régime de Khomeiny ne veut pas d’une guerre avec Israël, sachant pertinemment qu’il n’à pas les moyens de tenir un conflit de cette envergure. 

Mais selon Arash, un autre acteur avait tout intérêt à une escalade : Benjamin Netanyahou, le premier ministre israélien. Depuis octobre dernier, les bombardements israéliens à Gaza ont tué près de 33 000 Palestiniens. « La responsabilité est partagée, mais Netanyahou veut bien plus de cette guerre que le leadership iranien, pour sa survie politique et pour la survie de sa coalition ». La veille de la riposte iranienne, Jean-Luc Mélenchon avertissait sur les risques d’une guerre totale dans laquelle nous entraînerait le premier ministre israelien en continuant son nettoyage ethnique à Gaza, ses incursions coloniales en Cisjordanie et ses agressions continuels au Liban. « Nous pouvons prévoir chaque étape de l’escalade en cours. L’Iran répliquera, comme c’est une évidence. Quel pays peut accepter de voir ses responsables assassinés dans une ambassade par un autre pays qui, à cette occasion, n’hésite pas de surcroît à violer la frontière de son voisin ? Quel pays ? Aucun. », analyse le fondateur de La France Insoumise dans un billet de blog publié le 13 avril. L’ancien ministre des affaires étrangères de François Mitterrand, Hubert Védrine, à établit le même constat sur le plateau de BFMTV suivant la riposte iranienne. « Israël a rasé le consulat iranien à Damas, il faut que vous le disiez ça ! » estimant que les autorités israéliennes se sont préparées en conséquence et que cette réaction iranienne n’a pas dépassé pas ce à quoi Israël devait s’attendre. Dans la phase qui s’ouvre désormais, la plupart des dirigeants occidentaux, conscients des conséquences incommensurables d’une escalade si Israël décidait de répliquer à cette riposte iranienne, ont appelé à la retenue. 

La France doit donc clairement écarter tout soutien à une riposte israélienne si Netanyahou la décidait, en contradiction avec les préconisations internationales. Et rien n’est acquis sur ce point, au contraire, tant on constate un affaiblissement de cette position dans le champ politique. Netanyahou a mis tout le monde devant le fait accompli en bombardant l’ambassade d’Iran,  et chaque acteur sur place le voulant bien s’est retrouvé pris dans l’engrenage. Ainsi la marine française a participé dans la nuit du 13 avril aux opérations de défense d’Israël. Nous en avons été informés par… le gouvernement de Netanyahou, sans que le Parlement soit consulté ou même averti de quoi que ce soit. Les députés la France Insoumise de la commission de la défense, Bastien Lachaud et Aurélien Saintoul, ont demandé des explications au président de la commission ainsi qu’une audition en urgence du Ministre des Armées, Sébastien Lecornu.

Historiquement, la position non-alignée au service de la paix n’a jamais été un monopole de la gauche de rupture, même si elle fait partie de notre patrimoine politique. De de Gaulle à Chirac en passant par Mitterrand elle était portée au sommet de l’Etat, particulièrement s’agissant de la situation au Proche Orient.  Or depuis le 7 octobre, nous avons assisté à nouvelle rupture avec cette héritage diplomatique français. Dès le 13 novembre une dizaine d’ambassadeurs de France au Moyen-Orient et du Maghreb ont rédigé et signé une note dénonçant le virage pro-israélien pris par Emmanuel Macron. Cette note vient appuyer les propos des anciens ministres des affaires étrangères comme Dominique de Villepin, qui a décrit Gaza comme « une prison à ciel ouvert » et qui avertissait depuis plusieurs mois sur les risques d’un élargissement régional du conflit. Après la riposte iranienne, l’ex-Premier Ministre à défendu une « ambiguïté diplomatique » pour éviter d’introduire la France « dans ce cycle et dans ce risque d’engrenage d’action-réaction ». Car la France doit d’abord œuvrer à « un objectif de stabilité et de paix ». 

La facture de la guerre est toujours adressée à la même adresse, quelque soit les acteurs: les peuples. « La majorité du peuple Iranien ne veut pas de la guerre. D’abord, le peuple iranien représente une société épuisée et fatiguée, qui n’a pas envie de se retrouver dans un conflit avec ses voisins. L’autre facteur à prendre en compte, c’est que le peuple ne fait pas confiance au régime islamique, ni sur la politique interne, ni sur le fait d’entraîner l’Iran dans une guerre » nous a précisé Arash Azizi. Suite à la riposte du 13 avril, la répression du régime des Mollahs s’est d’ailleurs abattue sur tous les militants pour la paix qui se sont opposés publiquement à la guerre, à travers la censure ou des arrestations. Comme l’a rappelé la France Insoumise en condamnant cette riposte : « La guerre reste un échec politique et elle ne produit rien d’autre que de nouvelles violences, de nouvelles escalades et des souffrances sans recours pour les populations civiles de chaque camp. »

Quid de la suite ? Enseignante-chercheuse en science politique à l’université de New-York, Monica Marks est convaincue que la riposte iranienne a servi les ambitions d’escalade de Netanyahou et affaibli la cause palestinienne. « Symboliquement, la riposte intervient le jour où pour la première fois, 30 membres du Congrès américains ont appelé à la conditionnalité de l’armement d’Israël. C’est la première fois de l’histoire que je vois ça ! » nous raconte la spécialiste du Moyen-Orient. Pour elle, même aux États-Unis, la fenêtre d’overton* s’est élargi et la cause palestinienne à fait son bout de chemin. « Le bombardement qui à tué les humanitaires de World Central Kitchen à traumatisé les Américains et les Occidentaux. Il y à clairement un biais raciste car il aura fallu que des occidentaux soient ciblés alors qu’il y a très probablement un génocide des Palestiniens en cours. Mais le vent avait clairement tourné pour le gouvernement de Netanyahou » analyse Marks, qui pense qu’avec la riposte iranienne, la donne a clairement changé. « Les sujets qu’on a pu mettre sur la table comme l’aide humanitaire à Gaza, un cessez-le-feu permanent mais aussi l’embargo sur les armes, sont désormais écartés et discrédités. Le débat est écrasé par l’enjeu du soutien d’Israël  face à  l’Iran. » Et le massacre passe à nouveau au second plan. On observe le même phénomène en France, ou la demande d’embargo sur les armes à destination d’Israël a été violemment attaquée par les représentants de la droite et l’extrême-droite et l’ensemble des soutiens inconditionnels au gouvernement d’extrême-droite israelien qui n’a respecté aucune des résolutions de la Cour internationale de justice suite à l’établissement par cette dernière d’un risque de génocide à Gaza. Si la France Insoumise à maintenu sa demande pour une fin immédiate des ventes d’armes à Israël, le Parti socialiste est revenu sur son communiqué du 6 avril appelant à un embargo sur la vente d’armes et de munitions à Israël, déclarant par la voix de son député Jérôme Guedj que ce communiqué n’était que « symbolique. » Ces exemples montrent que la riposte iranienne servi les intérêts directs de Netanyahou. Toujours selon Monica Marks, « il y a beaucoup de pression sur le premier ministre israélien : c’est le gouvernement le plus extrémiste de l’histoire d’Israël, et il ne tient qu’à un fil. Dans ce gouvernement, il y a des personnalités qui ont soutenu ouvertement le terrorisme d’extrême-droite. Cette tendance politique veut depuis longtemps une guerre avec l’Iran »

Plus que jamais , la lutte pour la paix passe par le droit international, c’est la position de la France Insoumise depuis le début du conflit. Et pour que cela devienne une réalité, le droit doit rester une boussole universelle qui s’applique à toutes et tous, aux antipodes des visions manichéennes opposant « le bien » et « le mal » et empêchant de penser pour mieux faire accepter les guerres. 

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Marina Mesure

Syndicalisme international

Marina Mesure is a specialist of social issues. She has worked for several years with organizations defending workers’ rights such as the European Federation of Building and Wood Workers.

She has campaigned against child labor with the International Labor Organization, against social dumping and the criminalization of unionism. As a famous figure in the international trade union world, she considers that the principle of “equal work, equal pay « remain revolutionary: between women and men, between posted and domestic workers, between foreigners and nationals ».

Marina Mesure, especialista en asuntos sociales, ha trabajado durante varios años con organizaciones de derechos de los trabajadores como la Federación Europea de Trabajadores de la Construcción y la Madera.

Llevo varias campañas contra el trabajo infantil con la Organización Internacional del Trabajo, contra el dumping social, y la criminalización del sindicalismo. Es una figura reconocida en el mundo sindical internacional. Considera que el principio de « igual trabajo, igual salario » sigue siendo revolucionario: entre mujeres y hombres, entre trabajadores desplazados y domésticos, entre extranjeros y nacionales « .

Spécialiste des questions sociales, Marina Mesure travaille depuis plusieurs années auprès d’organisations de défense des droits des travailleurs comme la Fédération Européenne des travailleurs du Bâtiment et du Bois.

Elle a mené des campagnes contre le travail des enfants avec l’Organisation internationale du travail, contre le dumping social, la criminalisation du syndicalisme. Figure reconnue dans le monde syndical international, elle considère que le principe de « travail égal, salaire égal » est toujours aussi révolutionnaire : entre les femmes et les hommes, entre les travailleurs détachés et domestiques, entre étrangers et nationaux ».

Sophia Chikirou

Directrice de la publication

Sophia Chikirou is the publisher of Le Monde en commun. Columnist, director of a documentary on the lawfare, she also founded several media such as Le Média TV and the web radio Les Jours Heureux.

Communications advisor and political activist, she has worked and campaigned in several countries. From Ecuador to Spain, via the United States, Mexico, Colombia, but also Mauritania, she has intervened with progressive and humanist movements during presidential or legislative campaigns.

In 2007, she published Ma France laïque (La Martinière Editions).

Sophia Chikirou es directora de la publicación de Le Monde en commun. Columnista, directora de un documental sobre el lawfare, también fundó varios medios de comunicación tal como Le Média TV y la radio web Les Jours Heureux.

Asesora de comunicacion y activista política, ha trabajado y realizado campañas en varios países. Desde Ecuador hasta España, pasando por Estados Unidos, México, Colombia, pero también Mauritania, intervino con movimientos progresistas y humanistas durante campañas presidenciales o legislativas.

En 2007, publicó Ma France laïque por Edicion La Martinière.

Sophia Chikirou est directrice de la publication du Monde en commun. Editorialiste, réalisatrice d’un documentaire sur le lawfare, elle a aussi fondé plusieurs médias comme Le Média TV et la web radio Les Jours Heureux.

Conseillère en communication et militante politique, elle a exercé et milité dans plusieurs pays. De l’Equateur à l’Espagne, en passant par les Etats-Unis, le Mexique, la Colombie, mais aussi la Mauritanie, elle est intervenue auprès de mouvements progressistes et humanistes lors de campagnes présidentielles ou législatives.

En 2007, elle publiait Ma France laïque aux éditions La Martinière.

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