Cet article fait partie du dossier En temps de pandémie

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Sous le masque du Coronavirus

Les épidémies sont de vieilles compagnes de l’Histoire humaine. Elles ont toutes été le résultat de la mondialisation, c’est-à-dire du fait que, si loin que l’on remonte dans le temps, les êtres humains se sont toujours déplacés et ils ont donc transporté avec eux d’un endroit vers l’autre les microbes auxquels ils avaient eux-mêmes survécu. On connaît le terrible impact des maladies transportées par les conquistadors sur le monde des Indiens d’Amérique. Il explique aussi comment les populations nomades de tous les continents ont pu être exterminées par les sédentaires survivants des maladies qu’ils avaient contractées.

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Discours devant le Parlement européen : Macron ne touchera pas aux prébendes de big pharma

Lors de son discours devant le Parlement européen Emmanuel Macron a multiplié les renoncements, comme sur le pacte de stabilité, qui n'a même pas été évoqué. Les hypocrisies, comme sa proposition d’inscrire le droit à l’avortement dans la Charte des droits fondamentaux, pour mieux faire oublier que les marcheurs venaient d’élire à la présidence du parlement européen une fervente opposante au droit à l’IVG. Les formules d’un niveau de généralité leur enlevant toute signification, comme les développements laborieux sur la souveraineté. Bref, on aura eu le droit à un discours structuré autour de « trois grandes promesses » mais dont il n’y a guère à attendre si ce n’est la continuité en Europe d’un modèle autoritaire et ordolibéral qui sied au président de la République.

La levée des brevets sur les vaccins contre le covid fait partie de ces dossiers sur lesquels l’UE restera sous la présidence française campée sur une vision mercantile inapte à éradiquer la pandémie. Tout en parlant sans rire de solidarité, Emmanuel Macron a ainsi indiqué que d’ici à la fin juin 2022 l’Union européenne aura fait don de 700 millions de doses de vaccins à l’Afrique. Voilà surtout une manière de dire, en creux, qu’elle se contentera d’une politique de charité intéressée tout en continuant à bloquer au sein de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) la proposition de l’Inde et de l’Afrique du Sud, soutenue par plus de 60 pays, de lever au moins temporairement les brevets sur les vaccins et autres moyens médicaux de lutte contre la pandémie de Covid-19.

A la place l’UE a échafaudé une obscure « proposition visant à obtenir l’engagement des membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en faveur d’un plan d’action commercial multilatéral pour accroître la production de vaccins et traitements contre la COVID-19 et garantir un accès universel et équitable ». En clair, l’UE (comme les USA) considère le vaccin comme une marchandise comme les autres, non comme un bien commun. Et elle n’a pas l’intention de concrétiser en actes les paroles de certains dirigeants qui, comme Macron, se sont sentis obligés, après les déclarations de Joe Biden en ce sens, de se dire favorables à la levée des brevets.

Cette levée des brevets, que le candidat de l’Union Populaire défend lui depuis que les premiers vaccins ont été approuvés, n’a pourtant jamais été aussi urgente et pertinente.

D’abord, la situation de la pandémie le justifie plus que jamais. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), si la vague de variant Omicron pourrait à terme permettre d’atteindre l’immunité collective et une sortie de l’épidémie, rien ne le garantit. A l’inverse, au regard de la très forte contagiosité du variant Omicron et donc de la multiplication extrêmement rapide des cas dans le monde, elle met en garde contre le risque de nouvelles mutations vers des variants plus dangereux. Catherine Smallwood, responsable des situations d’urgence à l’OMS, a ainsi déclaré : « Plus Omicron se répand, plus il se transmet et plus il se réplique, plus il est susceptible de générer un nouveau variant.  (…) Qui peut dire ce que le prochain variant pourrait générer ? »

Une chose est certaine, toujours selon l’OMS, « les mutations du coronavirus SRAS-CoV-2 ont tendance à se produire surtout chez les personnes non vaccinées, où l’agent pathogène est plus susceptible de se répliquer. L’objectif principal doit continuer à être « de vacciner tout le monde afin de réduire les risques de mutation ». Si la vaccination ne protège pas forcément contre la contraction du virus, elle en atténue fortement les symptômes. Lors de la vague Omicron le continent africain, de loin le moins vacciné, a enregistré la plus forte hausse du nombre de décès (+72%), loin devant l’Asie du Sud-Est (9%) et les Amériques (7%).

L’OMS estime en définitive qu’un taux de couverture vaccinale de 70% à l’échelle mondiale est essentiel pour avoir une chance d’enrayer la multiplication des variants. Elle a rappelé début janvier que les pays riches ne pourraient pas se sortir de la pandémie « à coup de doses de rappel » si des milliards d’individus n’ont pas accès au vaccin. Elle a donc demandé de faire davantage pour aider tous les pays à recevoir le plus rapidement possible les vaccins contre la Covid-19 qui peuvent leur sauver la vie.

Au rythme actuel, la barre des 70 % de vaccinés ne sera atteinte en Afrique qu’en 2024…

On est loin du compte. La couverture vaccinale à l’échelle mondiale reste très insuffisante. 8.7 milliards de doses de vaccin ont été administrées dans le monde début 2022, mais réparties de manière très inégale. Moins de la moitié de la population mondiale (44,95 %) est vaccinée. Le taux est de 67,45 % de vaccinés dans les pays riches, contre seulement 4,36 % dans les pays pauvres. En Afrique le taux global de vaccinés était fin décembre de 8 %, avec de fortes disparités. Au rythme actuel, la barre des 70 % de vaccinés ne sera atteinte en Afrique qu’en 2024…

La politique de charité pratiquée par les « les occidentaux » n’est pas seulement une manière de ne pas remettre en question les dogmes du marché tout en prétendant faire œuvre de solidarité (d’un côté on vend des milliards de doses de vaccins, de l’autre on donne quelques centaines de millions de surplus, dont la date de péremption est parfois si proche qu’ils en sont inutilisables). Hypocrite, cette politique est aussi totalement inapte à enrayer la pandémie. Les divers dispositifs de dons (COVAX, dons en bilatéral etc.) sont insuffisants. Ainsi, en plusieurs annonces en 2021 les membres du G7 avaient promis de redistribuer via le dispositif Covax un total de près de 2 milliards de doses de vaccins d’ici la fin 2022. Or non seulement ces engagements étaient très insuffisants, puisque selon l’OMS, 11 milliards de doses étaient nécessaires en urgence pour en finir avec la pandémie ; mais ils ne seront pas respectés puisque moins de 20% de ces dons ont été livrés à l’heure actuelle. Et plus des deux tiers des dons concernent des vaccins dont la durée de conservation est inférieure à trois mois.

Enfin, si la levée des brevets n’a jamais été aussi pertinente, c’est que l’un des arguments utilisés pour s’y opposer vient d’être pulvérisé par plusieurs ONG. On se souvient que, outre la soi-disant nécessité d’« encourager l’innovation » (alors que les fabricants de vaccins aux Usa comme en Europe ont reçu des milliards d’aides publiques), que les libéraux nous opposent comme un seul homme que le défi de la production serait plus dure à relever que celui de la propriété intellectuelle (une homogénéité indiquant au passage que l’argument émane de quelque officine à la solde de l’industrie pharmaceutique). Dès lors il ne servirait à rien d’avancer sur la levée des brevets… Macron affirmait ainsi en mai 2021 : « Quel est le sujet actuellement ? Ce n’est pas vraiment la propriété intellectuelle. Vous pouvez donner la propriété intellectuelle à des laboratoires qui ne savent pas produire, ils ne le produiront pas demain ».

Or l’argument, qui n’a jamais été pertinent, a été officiellement balayé dans une étude publié mi-décembre par plusieurs ONG. Ces dernières ont recensé au moins 100 compagnies en Afrique, en Asie et en Amérique Latine ayant les capacités de produire des vaccins, y compris à ARN messager (les plus efficaces face aux variants), dans des conditions répondant à toutes les normes en vigueur. Si la levée des droits de propriété intellectuelle était effective, des centaines d’unité de production supplémentaire pourraient donc produire des vaccins dans des régions du monde où ils manquent cruellement. En mai 2021, Thierry Breton, commissaire européen, avait déclaré pour temporiser sans assumer son hostilité à faire des vaccins un bien commun : « Cette question de la levée des brevets, il faudra qu’on se la pose, mais en son temps ». Le temps est largement venu.

Dans le même dossier

L’accès aux vaccins contre le Covid-19 n’est toujours pas assuré pour tous. De nombreux pays, particulièrement en Afrique, doivent affronter des difficultés d’approvisionnement. En parallèle, les pays riches jettent à gogo des doses expirées….

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Marina Mesure

Syndicalisme international

Marina Mesure is a specialist of social issues. She has worked for several years with organizations defending workers’ rights such as the European Federation of Building and Wood Workers.

She has campaigned against child labor with the International Labor Organization, against social dumping and the criminalization of unionism. As a famous figure in the international trade union world, she considers that the principle of “equal work, equal pay « remain revolutionary: between women and men, between posted and domestic workers, between foreigners and nationals ».

Marina Mesure, especialista en asuntos sociales, ha trabajado durante varios años con organizaciones de derechos de los trabajadores como la Federación Europea de Trabajadores de la Construcción y la Madera.

Llevo varias campañas contra el trabajo infantil con la Organización Internacional del Trabajo, contra el dumping social, y la criminalización del sindicalismo. Es una figura reconocida en el mundo sindical internacional. Considera que el principio de « igual trabajo, igual salario » sigue siendo revolucionario: entre mujeres y hombres, entre trabajadores desplazados y domésticos, entre extranjeros y nacionales « .

Spécialiste des questions sociales, Marina Mesure travaille depuis plusieurs années auprès d’organisations de défense des droits des travailleurs comme la Fédération Européenne des travailleurs du Bâtiment et du Bois.

Elle a mené des campagnes contre le travail des enfants avec l’Organisation internationale du travail, contre le dumping social, la criminalisation du syndicalisme. Figure reconnue dans le monde syndical international, elle considère que le principe de « travail égal, salaire égal » est toujours aussi révolutionnaire : entre les femmes et les hommes, entre les travailleurs détachés et domestiques, entre étrangers et nationaux ».

Sophia Chikirou

Directrice de la publication

Sophia Chikirou is the publisher of Le Monde en commun. Columnist, director of a documentary on the lawfare, she also founded several media such as Le Média TV and the web radio Les Jours Heureux.

Communications advisor and political activist, she has worked and campaigned in several countries. From Ecuador to Spain, via the United States, Mexico, Colombia, but also Mauritania, she has intervened with progressive and humanist movements during presidential or legislative campaigns.

In 2007, she published Ma France laïque (La Martinière Editions).

Sophia Chikirou es directora de la publicación de Le Monde en commun. Columnista, directora de un documental sobre el lawfare, también fundó varios medios de comunicación tal como Le Média TV y la radio web Les Jours Heureux.

Asesora de comunicacion y activista política, ha trabajado y realizado campañas en varios países. Desde Ecuador hasta España, pasando por Estados Unidos, México, Colombia, pero también Mauritania, intervino con movimientos progresistas y humanistas durante campañas presidenciales o legislativas.

En 2007, publicó Ma France laïque por Edicion La Martinière.

Sophia Chikirou est directrice de la publication du Monde en commun. Editorialiste, réalisatrice d’un documentaire sur le lawfare, elle a aussi fondé plusieurs médias comme Le Média TV et la web radio Les Jours Heureux.

Conseillère en communication et militante politique, elle a exercé et milité dans plusieurs pays. De l’Equateur à l’Espagne, en passant par les Etats-Unis, le Mexique, la Colombie, mais aussi la Mauritanie, elle est intervenue auprès de mouvements progressistes et humanistes lors de campagnes présidentielles ou législatives.

En 2007, elle publiait Ma France laïque aux éditions La Martinière.

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